Just for work, promise — will

Il est neuf heures lorsque Kristen pousse les portes de l’immeuble qui abrite le bureau de William. Elle s’était jurée d’éviter de croiser le substitut du procureur pendant un moment, pas vraiment prête à l’idée de renouer une amitié après ce qu’il s’était passé entre eux. Comme un coup du destin ou une volonté du quarantenaire de ne pas lui avouer les véritables raisons de sa venue à l’hôpital lors du gala d’inauguration, l’obstétricienne devrait encore affronter le fait de se retrouver seule à seule avec son ancien amant. Cette idée lui faisait peur mais la ravissait en même temps, tant de contradiction qui lui faisait comprendre que la page allait être compliquée à tourner. Elle avait rendez-vous avec Will concernant son témoignage au procès de celui qui avait largué le pavé sur la fenêtre du hall d’entrée de l’hôpital. Ce malheureux évènement avait plongé le Mercy Hospital dans la panique et avait donné à Ali une méchante commotion à la tête. Une journée qui malgré la peur, était aujourd’hui plus facile à aborder pour la femme à la chevelure de feu. Elle déambule dans les bureaux du procureur, ses talons claquent contre le bitume, elle est vêtue d’une robe noire, cintrée, celle qu’elle a l’habitude de porter sous sa blouse blanche de chirurgienne. Elle enchaîne avec des consultations juste après son échange avec William, elle espère que ça ne durera pas trop longtemps, elle a déjà envie de s’enfuir mais elle se retient, son témoignage est important dans cette affaire. Kris arrive au niveau de sa secrétaire qui lui indique que Will est prête à la recevoir. L’ancienne photographe met quelques secondes avant d’apposer la main sur la poignée, elle se demande si elle suffisamment apprêtée pour revoir Will puis fait non de la tête en se disant qu’elle ne peut plus penser à ce genre de choses, elle se l’est formellement interdit. Will n’est qu’un ami, comme il l’a si bien dit. — Salut. lance-t-elle en s’approchant furtivement de son ami pour déposer un baiser sur sa joue en guise de bonjour. Son visage est encore marqué par les bris de glace qui sont venus lui couper la peau mais elle s’en remet petit à petit et merci à l’inventeur du fond de teint de lui permettre de ne pas effrayer tous les enfants de la ville. Ce bureau elle le connait, très bien même, inutile de ressasser le passé en se remémorant un merveilleux instant avec Will dans cette pièce après un déjeuner express. Cette pensée la même quelque peu mal à l’aise suite à la tournure des évènements. — Je t’écoute, comment tu veux qu’on procède ? demande-t-elle dans l’idée d’en venir directement aux faits. Elle n’a pas envie de tergiverser, elle a besoin de temps pour digérer le fait qu’ils ne sont que des amis, rien de plus. — J’ai mis sur papier tout ce dont je me souviens de ce jour-là. dit-elle en lui tendant le papier qu’elle avait soigneusement glissé dans son sac avant de quitter la maison. En bonne élève, elle s’était dit que c’était une bonne idée de procédé ainsi, elle voulait que cet homme soit puni pour le chaos qu’il avait créé sur son lieu de travail.

Il s’est plongé dans l’affaire sans réfléchir – il a dû jouer des pieds et des mains auprès de ses collègues et du procureur lui-même pour obtenir l’accord de réellement s’emparer du dossier. Il a été le premier sur les lieux, qu’il a plaidé dans le bureau de son supérieur, il a pu constater de ses propres yeux des dégâts et il a déjà pris contact avec le personnel de l’hôpital. Un léger mensonge par omission, nul besoin de leur préciser qu’il a besoin de cette enquête pour concentrer sa colère sur quelque chose de plus concret. Qu’il veut s’assurer que le responsable sera traité comme il se doit et qu’il n’y ait pas le moindre risque qu’il puisse rentrer chez lui le soir du procès. Il s’est retenu de dire qu’il connaît des médecins qui étaient sur les lieux parce qu’ils en connaissent tous ; parce qu’il distingue toujours le cadre travail et hors travail même si ça lui semble compliqué, à présent. Assis à son bureau, une main portée à sa tempe qu’il masse, il a les yeux bloqués sur le nom de Kristen avec qui il a rendez-vous d’un instant à l’autre. Il le sait, que cette histoire est bien trop personnelle et qu’il aurait dû laisser un collègue s’en charger (Morris ou Davis, les deux figurant parmi les meilleurs du bureau, après lui) mais sur le moment, il s’agissait d’une revanche, d’un peu de fierté aussi. Ne pas avoir à perdre la face en annonçant à Kristen que, finalement, il ne serait pas sur le dossier quand il lui a promis de faire en sorte de faire payer celui qui est la cause des marques sur son visage et de la commotion de son ex-mari. Tina apparaît dans l’encadrement de la porte pour lui annoncer que Kristen s’est présentée à l’accueil, un instant plus tôt, qu’elle ne devrait pas tarder. Il lui lève un regard, se demande ce qu’elle pourrait deviner de sa relation avec l’obstétricienne avant de refouler l’idée – parce qu’il n’y a rien. Juste la même amitié que celle qui les lie depuis quelques temps maintenant, les séances de surf et les verres échangés sans la moindre arrière-pensée en moins. La porte s’ouvre, il relève les yeux, quitte son fauteuil pour accueillir la chirurgienne. Sa main frôle son épaule brièvement, avant qu’il ne la tende en direction du canapé qui orne son bureau. « Ça a l’air d’aller ? » Il prend place sur un fauteuil plutôt que sur le canapé, instaurant une distance sans vraiment le vouloir. Sur la table basse qui s’interpose entre eux sont alignées les pages des dépositions des médecins et patients présents à l’hôpital ce soir-là, des photos des lieux. Il pose les yeux sur le papier soigneusement plié qu’elle lui tend, l’attrape et le déplie pour le parcourir rapidement des yeux. « Merci. On peut s’en servir, il faudra juste le faire parvenir à la partie adverse. » Il marque une courte hésitation durant laquelle il attrape un stylo qu’il danser sur ses doigts. « Ce serait plus parlant si tu pouvais témoigner. Raconter, à voix haute, ce qu’il s’est passé pour que le jury ait un aperçu de l’effet que ça a eu. Tu n’es pas obligée de le faire si tu n’en as pas envie, » précise-t-il aussi sec, l’image d’une Kristen bouleversée et terrifiée lui revenant aux yeux. Il sait que c’est cette image-là que le jury aura besoin de voir pour se sentir véritablement concernée – mais lui, il se sait incapable de la supporter une nouvelle fois sans flancher. Beaucoup trop proche de ce dossier. « Si tu décides de témoigner, tu ne seras pas seul. Certains de tes collègues ont déjà accepté de le faire mais plus nombreux vous êtes et plus ça nous aidera à toucher le jury et à le faire condamner. » Il cherche à croiser son regard, une boule d’émotions mitigée logée au fond de son estomac.

Tandis que William l’invite à prendre place dans le canapé, Kris retient sa robe pour s’asseoir afin d’éviter qu’elle ne remonte trop. Elle tient à garder ce moment le plus professionnel possible même si quelques jours plus tôt sur la plage elle a accepté la proposition du substitut du procureur de rester amis. Cependant, dans sa tête à cet instant elle espérait bien l’éviter le plus possible, la situation la mettait mal à l’aise, elle s’en voulait d’avoir pensé une telle chose même si au fond d’elle, elle était sûre de ce qu’elle avait perçu lors de ses moments d’égarements avec Will, elle n’était pas la seule à avoir développé des sentiments. Comme pour établir une distance de sécurité entre eux, son ami prend place sur le fauteuil d’en face. Ils n’ont jamais été aussi éloignés. Le quarantenaire lui fait remarquer que ça a l’air d’aller. — Tu sais ce qu’on dit, plus de peur que de mal. dit Kris comme si elle parlait d’une simple chute à vélo. Il lui arrivait quand même de faire des cauchemars la nuit, se revoyant protéger Sofia et découvrir Ali sur le sol. Ce n’était pas la situation qui lui faisait peur mais plutôt l’idée de perdre un autre membre de sa famille. C’était surtout ça qui l’avait chamboulée mais dorénavant elle était prête à en parler pour que la personne paie les conséquences de ses actes. La chirurgienne ne peut s’empêcher de contempler les différents documents présents sur la table basse, les photos attirent son attention, la vitre du hall d’entrée à déjà était remplacée, comme si tout le monde voulait éviter de repenser à cette soirée d’inauguration. Elle hoche la tête lorsque Will lui fait remarquer qu’il faudra faire parvenir ce qu’elle a écrit à la partie adverse. Après tout, c’est lui le substitut, il sait ce qu’il fait et elle ne peut qu’approuver ses actions. Son ami lui indique que ça aurait plus d’impact qu’elle témoigne au procès. — On nous a déjà briefé à l’hôpital, c’est aussi pour ça que je suis ici, ils veulent mettre toutes les chances de leur côté. répliqua Kristen. Ils avaient été quelque peu incités à venir témoigner lors du procès, indiquant que ça aurait plus d’impact et si personne n’avait osé mettre de mot sur la chose, ça leur permettrait aussi de ramasser un sacré paquet d’argent. D’ailleurs on leur avait indiqué que les personnels qui viendraient témoigner aurait quelques avantages. Ce n’était pas pour cette raison que Kris avait choisi de témoigner mais bel et bien parce qu’elle voulait que justice soit faite. Elle avait eu tellement peur sur le moment qu’elle voulait que cet acte soit puni. — Je vais le faire. dit-elle en se redressant comme pour se donner du courage. Elle avait déjà témoigné à quelques procès, notamment sur les conseils de son ami Kendra mais là c’était différent. Elle ne témoignait pas pour une tierce personne mais pour elle-même. La chirurgienne savait que ça allait être plus compliqué pour elle. C’est toujours plus difficile lorsque ça nous concerne et elle en avait conscience. — On m’a dit de prendre rendez-vous avec toi pour que tu me prépares pour le procès. fait-elle remarquer. Sous-entendu qu’elle n’est pas venu ici pour lui même si une petite voix au fond d’elle est plutôt contente d’avoir affaire à Will pour la préparation du procès. — Est-ce que tu penses qu’on a une chance de gagner ? finit-elle par demander par simple curiosité. Elle espérait que son ami lui réponde positivement mais elle préférait savoir dans quoi elle allait s’embarquer.

Son regard s’attarde sur elle plus que de raison et il dérive finalement ses yeux bruns pour effacer les idées qui se glissent dans son crâne. A la place, il opine car oui, il sait ce qu’on dit mais ça ne veut pas dire que la peur est moins terrible que le mal – parfois, même, c’est tout l’inverse et ça aussi, il le sait. Elle ne s’attarde pas sur le sujet, il n’insiste pas. Il n’a jamais été bon pour le réconfort, jamais été bon pour rassurer les autres ou pour les inciter à parler (sauf dans une affaire qu’il couvre mais c’est encore différent). Il assume peut-être qu’elle parlera quand elle s’en sentira prête, qu’elle videra son sac si elle en éprouve soudainement le besoin mais, dans le fond, il sait très bien que ce ne sera pas à lui qu’elle ira se confier. Sûrement qu’il ne peut pas la blâmer. Elle est plus prompte à lancer le sujet de sa présence dans son bureau et il suit, revêtant l’habit de substitut du procureur avec une aisance qu’il ne doit qu’aux années passées à séparer vie professionnelle et vie personnelle. Son papier en main, les yeux parcourant les lignes tracées à la main, il hoche la tête lentement. Sa brève entrevue avec les hautes têtes de l’hôpital l’avait déjà tenue au courant – il devine sans peine les motivations cachées derrière. Faire taire cette histoire, inciter les gens aux dons pour reconstruire le hall et récolter l’argent du procès pour passer à autre chose. Rapidement. Ça fait écho aux discours de certains par rapport au cabinet qui les accueille – mais Robert s’y est opposé. Les dégâts causés par les manifestants ont laissé leur marque, aussi bien sur le mobilier que dans l’esprit des avocats présents. William, lui, préfère ne pas y penser. Il relève les yeux vers elle quand elle se redresse, affirme qu’elle va le faire. Un éclat d’admiration brille dans le regard de l’avocat, parce qu’elle est une battante, Kristen. Et elle le prouve, une nouvelle fois. « Oui, c’est pour que tu sois préparée à mes questions et qu’on puisse voir ensemble tes réponses. Chaque mot à son importance lors d’un procès et l’avocat de la défense n’hésitera pas à sauter sur une erreur de vocabulaire pour détruire un témoignage. » C’est un combat acharné, une bataille où les bassesses sont autorisées – du moment que la partie est remportée, à la fin. William, il y a souvent été déclaré vainqueur parce qu’il excelle quand il s’agit de repérer une brève hésitation, une faille. Il s’y glisse avec sournoiserie et peu importe que le témoin puisse le haïr à cet instant, pour peu qu’il parvienne à ses fins. Il a choisi le versant du procureur pour éviter d’avoir le mauvais rôle ; parce qu’il a toujours préserver son image, habitué à devoir la soigner pour essayer d’exister aux yeux du père. « On a des preuves de sa culpabilité. La vidéo que l’hôpital nous a fournit le montre très clairement lancer ce pavé. Il sera déclaré coupable de son geste, c’est une certitude. Le problème, ce n’est pas tant de savoir s’il sera désigné comme étant le responsable, mais plutôt de faire en sorte de prouver qu’il avait l’intention de blesser en agissant. » Sans l’intention, il s’en sortira avec une caution un peu salée, des chèques à signer pour compensation de dégâts matériels causés à l’hôpital. Il n’y aura aucune vraie peine qui viendra entacher son casier judiciaire parce qu’il sera déclaré victime d’un malencontreux hasard qui aura voulu que le pavé heurte une tête. C’est son job de faire en sorte que le hasard n’y était pour rien et qu’il y avait au moins l’intention de causer du tort à l’hôpital. Il regroupe quelques papiers sur la table basse, dépose le témoignage écrit de Kristen à côté. « Si tu es prête, j’aimerai qu’on commence par tout ce dont tu te souviens. Essais de, hm, raconter ce qu’il s’est passé en te remémorant un maximum de détails. Ensuite je te poserai des questions et tu pourras répondre spontanément et ensuite on travaillera vraiment sur comment je vais tourner mes questions lors du procès et ajuster tes réponses en fonction. » Il lui jette un coup d’œil, s’assure que le programme lui convient – quitte à devoir s’arrêter au milieu et programmer un nouveau rendez-vous pour terminer.

Il y a tant de distance entre eux, elle est à la fois physique et psychique, comme si tout ce qu’ils avaient vécu jusque ici n’était jamais arrivé. Est-ce que c’était vraiment ce qu’elle voulait ? Kris se questionnait tandis qu’elle observait Will se comporter en véritable professionnel. Il est doué, très doué pour rester professionnel en toutes circonstances. La chirurgienne obstétricienne a toujours eu du mal à garder ses émotions ou ses réflexions pour elle. Elle a appris avec le temps, avec l’expérience. Elle revoit son mentor lui dire que c’était cette proximité avec les patients qui faisait d’elle un bon chirurgien mais que ça pouvait aussi la perdre en chemin. Ce n’était pas un patient qui l’avait fait fuir mais la perte d’un être cher. Elle s’est toujours beaucoup confiée à Will, pas autant qu’à Jack mais il est toujours resté un bon ami. Celui qu’elle appelait pour prendre un verre histoire de se changer les idées. Elle l’avait même pris en photo dans une grande affaire, elle l’a retrouvé il n’y a pas si longtemps que ça dans ses archives de son bureau. Le jour où elle a décidé de mettre un terme à sa carrière de photographe pour reprendre celle qui l’animait beaucoup plus. Les paroles du substitut la sorte de ses pensées. Elle a tellement l’impression d’être en face d’un robot qu’elle en avait presque oublié sa présence, elle préférait se remémorer les bons moments passés ensemble. Elle acquiesce avec un sourire forcé lorsqu’il lui indique qu’on lui a programmé ce rendez-vous pour qu’elle soit préparée. Elle ne témoignera pas en tant qu’experte cette fois-ci mais en tant que témoin et c’est là toute la différence. À sa question portant sur leurs chances de gagner, Will lui fait part de la vidéo de surveillance. Kristen se doutait qu’ils utiliseraient cette carte, après tout l’hôpital avait un système de vidéosurveillance haute gamme, ça serait dommage de ne pas s’en servir. Toutefois, elle ne peut s’empêcher de pencher sa tête sur le côté lorsqu’il fit mention du fait qu’il fallait qu’ils prouvent que l’homme en question voulait intentionnellement blessé quelqu’un. — C’est ce que tu crois ? questionna Kris. Si elle était d’accord pour que l’homme prenne conscience des conséquences de ses actes, elle avait du mal à croire qu’il voulait lancé ce pavé intentionnellement. Certes, il avait blessé Ali mais selon elle l’homme ne méritait pas la peine maximale pour ce qu’il avait fait. — Je ne pense pas qu’il ait voulu blessé quelqu’un je crois plutôt qu’il était pris dans un phénomène de groupe. dit-elle comme si son avis comptait pour quelque chose. Elle avait besoin d’en faire part à Will car elle n’était plus vraiment certaine de vouloir témoigner si le but était de donner à cet homme la peine maximale. Il avait fait une erreur, une grave erreur qui aurait pu se transformer en homicide involontaire mais ce n’était pas le cas. Elle laissa ses doutes de côté pour commencer à travailler sur son témoignage. Elle ferme les yeux commence le récit à son ami — C’était le soir de l’inauguration de l’opération de charité des soins pour tous, quand je suis arrivée, j’ai vu quelques manifestants mais ils ne faisaient que protester, ils n’étaient pas violents. Je me souviens avoir détourné mon regard en direction des manifestants après avoir bu une coupe de champagne et ils étaient beaucoup plus nombreux que quand je suis arrivée, la sécurité de l’hôpital avait l’air quelque peu dépassée par la situation. La directrice de l’hôpital allait monter sur l’estrade et c’est là qu’il y a eu un bruit de verre cassé, on aurait dit un coup de feu, c’est ce qui a provoqué le mouvement de foule, comme j’étais prêt de la fenêtre, j’ai serré ma fille dans mes bras et après je n’ai plus rien entendu. J’ai regardé la foule de manifestants et ils couraient à l’opposé et quand je me suis retournée, j’ai vu Ali, écroulé sur le sol … elle a la gorge nouée en prononçant ces quelques mots. Les images, la peur d’avoir perdu son ex-mari ce soir là ne sont pas des bons souvenirs. Elle ose à peine croiser le regard de William. Elle soupire, comme si ça l’aidait à faire disparaître les images dans sa tête. Ça semble être efficace car elle redirige ses yeux vers le substitut et elle ne peut s’empêcher de se remémorer ce moment où il a apposé sa main sur sa joue. Ce n’était pas un geste amical, elle en était certaine mais elle ne veut pas remettre cette conversation sur le tapis, Will a été clair sur le sujet. C’était déjà bien trop humiliant pour elle de se confier de la sorte sur la plage, elle n’avait pas envie de réitérer une conversation qui finirait au pied du mur. — C’est à peu près tout ce dont je me souviens. finit-elle par dire comme pour clore définitivement ses pensées.

Les silences sont lourds, se succèdent pourtant sans qu’il ne les brise. Il laisse parfois son regard dérivé dans la direction de Kristen avant de les détourner à nouveau. Il note l’atmosphère différente depuis la plage, ses vaines tentatives pour retrouver une complicité qu’ils ont partagé qui tombent à plat. Kristen, elle se met à lui échapper et il ignore si c’est à cause de quelque chose de nouveau ou si c’est lié à la conversation qu’ils ont échangé – elle lui a pourtant affirmé être satisfaite avec leur situation, ne repoussant que les rencontres plus nocturnes et il l’a crû. Pourquoi aurait-il remis en doute sa parole ? Kristen, elle ne ment pas. C’est l’image qu’il a toujours eu d’elle, de quelqu’un qui se terre quand les choses lui échappent mais qui est capable de le mettre devant le fait accompli quand il en a besoin. Mais là, William a l’impression de tendre une main qu’elle observe et repousse sans cesse et il n’est pas certain d’avoir la force de continuer à essayer de l’atteindre. L’idée, pourtant, de la laisser partir lui serre le cœur, lui noue autant l’estomac que la gorge. Il hausse les épaules, repoussant la réponse qui lui vient quand il s’interroge sur ce qu’il pourrait faire pour réussir à renouer avec elle, se concentrant sur l’affaire qu’il couvre, sur le procès à venir. « Je sais qu’on ne lance pas un pavé sans savoir que ça aura des répercussions. » Est-ce qu’il pense pour autant que l’intention était de blesser, physiquement, il n’en est pas sûr – mais l’intention était de nuire et, pour lui, ça lui suffit. Son job n’est pas de caresser les criminels dans le sens du poil, de leur tapoter dans le dos en leur demandant de faire plus attention la prochaine fois. Non, son travail, c’est de s’assurer qu’il n’y aura pas de prochaine fois. Contre toute attente, la voix de Kristen s’élève à nouveau, pleine d’une hésitation qui le force à lever son regard brun sur elle pour la dévisager. Shit, qu’il pense quand il comprend ce qu’elle essaie de dire. Parce qu’il suffirait d’une question, lors du procès, pour qu’elle l’énonce à voix haute et qu’elle distille le doute dans l’esprit du jury. Il ferme les yeux, inspire. « Il est le seul à avoir ramassé un pavé et à l’avoir lancé à travers une fenêtre. A mes yeux, c’est davantage une tentative de commencer quelque chose plutôt qu’un gamin qui suit bêtement ce que les plus grands font. » Il maîtrise sa voix, se veut posé plutôt qu’agace ou plaintif. Il n’a pas envie de se battre avec elle, pas à ce propos-là, pas quand il voudrait lui faire comprendre qu’il a eu peur. Pour elle. Pour Jack. Qu’il a vu la peur sur ses traits aussi, là-bas, à l’hôpital et que ça l’a déchiré de l’intérieur. « Il avait au moins l’intention de nuire. Peut-être pas celle de blessé, mais il n’a pas jeté ce pavé parce qu’on l’y a obligé ou parce qu’il voulait attirer l’attention. Il avait envie de nuire à l’hôpital et c’est ce qu’on appelle l’intention, » consent-il finalement, la voix radoucie mais la tension toujours présente dans ses épaules. Il laisse un ange passer, souhaite s’assurer qu’il n’y aura pas de débat ou d’autres divergences d’opinion sur ce sujet. Il n’aime pas voir Kristen prendre la défense de celui qui a provoqué un mouvement de panique. Il ne comprend pas qu’elle puisse prendre sa défense, même, alors qu’Alexander aurait pu être blessé plus gravement, avoir une concussion plus grave. L’empathie dont elle fait preuve lui échappe et il préfère changer de sujet, revenir à ce qui l’emmène dans son bureau en premier lieu. Il attrape de quoi prendre des notes tandis qu’elle débute le récit de ses souvenirs. La sécurité de l’hôpital dépassée – il jette un coup d’œil sur les documents fournis par l’hôpital pour vérifier le nombre d’agents présents, ce soir-là, sait que ce sera probablement un angle d’attaque de la défense. Il serre la mâchoire à la mention de Sofia, ferme les yeux. Il a déjà croisé la gamine à quelques reprises, n’ose pas imaginer la peur qui a du la traversé. Le mouvement de foule, la violence du bruit et du chaos et puis l’image de son père, blessé. Sujet que Kristen amène d’ailleurs, incapable pourtant de finir sa phrase, lui semble-t-il. Il relève la tête dans sa direction, une amertume passagère logée dans sa poitrine à l’idée qu’elle ait pu ressentir une peur suffisamment grande pour son ex-mari au point de ne pas oser l’avouer. Il la ravale, essaie d’effacer la pointe de jalousie qui s’empare de son être et il se pince le nez une fraction de seconde. « Il faut que tu décrives ce que tu as ressenti en voyant qu’Ali était blessé et… » Il s’interrompt parce qu’il sait qu’elle ne pas aimer ce qu’il va lui demander. Les paupières closes, il inspire profondément. « Et si tu peux aussi parler du fait que Sofia était là, de ce qu’elle a ressenti et de si ça l’a marquée, ça aiderait. » C’est un regard hésitant qu’il lui lance, la mâchoire contractée. Il n’ira pas jusqu’à demander si Sofia peut témoigner – quelque chose qui lui retombera dessus par le procureur et le reste de ses collègues, peu importe qu’il gagne ou non. La présence d’enfants à cette soirée représente un avantage non négligeable pour atteindre le jury, constater de l’impact psychologique que cette action a pu avoir sur l’ensemble des personnes présents mais il refuse d’avoir à faire monter Sofia à la barre. Il se souvient des mots d’Ali la concernant, du fait qu’elle ait déjà vu (ou voit peut-être encore) une psy et il ne veut pas lui demander de traverser une épreuve supplémentaire.

Deux inconnus, c’est exactement ce qu’ils sont à cet instant. Les paroles sont impersonnelles, professionnelles, comme s’ils n’avaient jamais partagé une quelconque intimité. C’est mieux comme ça tente de se persuader Kris. La descente a été trop douloureuse, elle a des sentiments pour Will et ce n’est pas pour rien qu’elle tenait à faire forte impression aujourd’hui en le rencontrant. Si d’ordinaire elle se sent à l’aise avec lui, aujourd’hui elle n’en dirait pas autant. Sa révélation a jeté un froid dans leur amitié et parfois elle se dit qu’elle n’aurait jamais dû lui faire de telles révélations ce matin-là sur la plage. Comment avait-elle pu croire que elle, Kristen Walcott, renverserait le plus grand don juan de Miami ? Will lui indique que cet homme n’a pas lancé le pavé sans savoir les répercussions que ça aura. Elle a envie de lever les yeux au ciel, le substitut est tellement dans le contrôle que ça ne doit pas lui arriver souvent de faire des erreurs. — Bon sang Will, ça ne t’es jamais arrivé de faire quelque chose que tu regrettes ? lui demande-t-elle comme si ça lui permettait de se déculpabiliser. Des erreurs elle en a faites, même une très grosse en quittant sa fille lors de sa première année de naissance et elle n’aimerait pas que l’on soit aussi catégorique sur les raisons qu’ils l’ont motivé à faire ce choix. Le substitut finit par la convaincre en lui disant qu’il avait au minima l’intention de nuire. Elle s’enfonce alors dans le canapé, elle n’a plus de position défensive à avoir même si elle n’est pas à l’aise avec l’idée que son témoignage déterminera la vie d’un homme. — Est-ce que je peux le rencontrer, cet homme ? Je me doute que la procédure ne le permet pas mais est-ce qu’en tant qu’ami tu pourrai me donner son identité ? dit-elle en jouant la carte de l’amitié même si à ses yeux ils ne retrouveront jamais la relation qu’ils avaient auparavant. Elle avait besoin de comprendre, de savoir ce qui était passé dans la tête de cet homme pour ne pas s’en vouloir d’envoyer en prison un homme qui a simplement fait une erreur. Le substitut lui demande de revenir sur ce qu’elle a ressenti lorsqu’elle a découvert Ali allongé sur le sol et ce que Sofia a également pu ressentir. La chirurgienne soupire, se livrer à coeur ouvert ne fait pas vraiment partie de ses compétences mais elle s’essaie à l’exercice, malgré tout. Elle se replonge lors de la soirée d’inauguration, des flashs lui reviennent en tête — Lorsque j’ai lâché Sofia, je me suis retournée pour chercher Ali du regard, j’ai immédiatement regardé vers le sol et … elle déglutit difficilement, ses yeux ne sont plus qu’axés sur la bague présente à son majeur qu’elle ne peut s’empêcher de tourner dans tous les sens comme pour lui faire oublier que Will est en face d’elle. — je l’ai vu, j’ai crié, Sofia a hurlé « papa, papa », j’ai immédiatement pris son pouls parce que quand on est chirurgien et qu’on voit quelqu’un étendu sur le sol avec une flaque de sang au niveau de la tête on pense tout de suite au pire … pendant un dixième de seconde, c’est ce que j’ai cru, qu’il était mort et que Sofia n’allait pu avoir de père. Sofia a fait des cauchemars toutes les nuits qui ont suivi l’accident, je crois qu’elle a été traumatisé de voir son père allongé comme ça sur le sol. et moi aussi pense-t-elle. Les yeux embués, elle regarde William avec affliction. — Je ne suis pas sûre d’avoir le courage ou l’envie de faire ce témoignage. finit-elle par dire en espérant capter une once de compassion dans le regard du substitut. Ce livrer de la sorte dans un tribunal, elle n’en a pas envie, tout simplement parce que ça lui fait remonter des souvenirs beaucoup trop douloureux.

Les mots résonnent dans l’air qui les sépare. William, il a relevé le regard vers Kristen, la gorge nouée d’une réponse qu’il n’est pas certain de vouloir connaître. Il voudrait répondre qu’il ne regrette rien, qu’il réfléchit toujours avant de prendre la moindre décision justement pour n’avoir aucun regret mais il a le souvenir frais de leurs discussions sur la plage et les regards fuyants de Kristen à l’hôpital. Il regrette de ne pas lui avoir dit qu’il était là pour elle, ce jour-là. Regrette d’avoir laissé l’écart se creuser entre eux quand ils ont partagé des instants de complicité qu’il a réellement apprécié. Il sait pourtant que cet aveu n’est pas autorisé alors il le renferme au fond de son esprit, essaie de se souvenir d’autres regrets qu’il pourrait avoir avant de se rendre à l’évidence. « Pas quand ça concerne la vie d’autrui. » Sa voix est plus grave que voulue, sonne plus dure qu’anticipée. Il ferme les yeux, laisse un souffle expirer entre ses lèvres pincées. Il n’est pas là pour avoir de l’empathie pour le coupable des faits – il est là pour s’assurer qu’il soit jugé à la hauteur de son crime, qu’il paie le mal fait aux autres et que ça lui passe l’envie de recommencer. Il se pince le nez, se redresse pour reprendre d’un ton plus posé. Evoque un vocabulaire propre à son domaine, essaie d’apaiser la tension qui semble être née de cette divergence d’opinion. Il l’observe sans rien ajouter, conscient de rester sur des charbons ardents jusqu’à ce qu’elle recule le dos pour prendre une position plus confortable. Ses épaules à lui s’affaissent, soulagées de ne pas avoir à porter une confrontation qu’il n’a pas envie d’avoir – ni aujourd’hui, ni jamais, probablement. Ses yeux s’écarquillent à la demande de Kristen mais il n’a pas le temps de refuser qu’elle se complète et le regard qu’il lui lance est brillant d’une supplication qui ne franchira pas ses lèvres. Don’t go there, please. Il la dévisage un instant, partagé entre un refus net parce qu’il sait que ça n’apporterait rien de bon et l’envie de ne pas étendre le fossé qui existe déjà entre eux. « Ce n’est pas une bonne idée, » avertit-il d’une voix hésitante. Marque un temps avant de prendre une décision. « Il s’appelle Column Franzen. Tu ne peux pas aller le voir s’il n’est pas accompagné de son avocat, est-ce bien clair ? » Il cherche à croiser son regard, à planter ses yeux bruns dans ceux, noisettes, de Kristen parce qu’il sait que si elle ne l’écoute pas, ça aura des conséquences. Il sait aussi qu’il ne devrait pas lui dévoiler le nom avant le procès – mais la chirurgienne peut être butée quand elle le souhaite et de ça aussi, il en a conscience. « Si tu veux le rencontrer, je verrais pour organiser une rencontre avec son avocat, » qu’il se complète finalement avec un soupir résigné. Parce que quitte à ce qu’elle voit Franzen pour l’interroger, autant que ce soit dans un cadre légal ; autant qu’il soit présent, lui aussi. Il lit l’appréhension sur les traits de Kristen tandis qu’elle récite de mémoire les souvenirs de la soirée et s’il se doute qu’elle doit revoir les images traumatisantes de sa fille paniquée et d’Alexander allongé sur le sol, lui, il ne peut pas empêcher les images de Kristen à l’hôpital l’assaillir. La mâchoire contractée, il s’efforce de rester concentré sur le récit, il suit le regard de la chirurgienne par automatisme. Aperçoit la bague qui orne son doigt et qui lui assène un coup dans la poitrine. Ils sont divorcés, qu’une voix lui souffle comme pour essayer de calmer les battements devenus effrénés de son cœur mais une autre lui rappelle qu’entre les deux Walcott, ça n’a jamais été question d’un manque d’amour. Les paupières closes pour faire taire le sentiment qui menace de s’emparer de lui, il essaie d’imaginer la scène qu’elle lui décrit, relève les yeux vers elle quand elle mentionne Sofia, traumatisée. Sofia qui, pourtant, n’a rien fait pour devoir subir ça à un si jeune âge. Il a la gorge qui se serre, l’impression qu’il va manquer d’air pendant une fraction de secondes et puis, sitôt que Kristen souffle son aveu, la crise passe. Il agit à l’instinct quand il quitte son fauteuil pour rejoindre la chirurgienne sur le canapé, il agit encore à l’instinct quand il lui attrape les mains pour la soutenir. « Personne ne t’oblige à témoigner. Personne ne va te juger si tu décides de ne pas monter à la barre. On a d’autres témoins et on a des preuves, si tu ne veux pas témoigner, ça ne fait rien, d’accord ? » Il a adopté le même ton rassurant qu’à l’hôpital, le même timbre d’où perce l’inquiétude. « Tu as rédigé ton témoignage et on pourra le lire sans que tu aies besoin de monter à la barre si ça te convient. » Son pouce caresse le dos de la main de Kristen avec tendresse, dans un réflexe dont il n’a pas totalement conscience, son regard descendant sur ses lèvres une fraction de secondes avant de remonter et de lui adresser un sourire qu’il espère suffisant pour la rassurer. Pour lui assurer qu’elle n’a pas besoin de s’infliger une étape supplémentaire – ils ont largement de quoi prouver que Franzen est coupable, de quoi obtenir une peine, petite ou grosse et il ne pourra pas plaider non coupable quoiqu’il en soit. La proximité lui saute soudain aux yeux et il lui relâche les mains, se lève pour se diriger vers la porte du bureau et demander à Tina de leur apporter deux verres d’eau. Elle est rapide à obtempérer, Tina, et revient avec un plateau contenant un pichet d’eau et deux verres qu’elle dépose sur la table basse avant de retourner à son bureau. William sert un premier verre qu’il tend à Kristen, s’installe à nouveau sur le canapé – suffisamment proche pour que leurs genoux soient sur le point de se toucher mais suffisamment éloigné pour que ça reste professionnel. « Comment sont tes nuits ? Tu as dis que Sofia faisait des cauchemars… » La question, il ne parvient pas à la poser alors il laisse le silence le faire à sa place ; est-ce qu’elle a des nuits troublées, elle aussi, ou bien parvient-elle à se reposer malgré tout. « Je ne demande pas en tant que substitut du procureur, » précise-t-il sans trop savoir pourquoi – peut-être pour qu’elle sache qu’elle peut parler librement, qu’elle peut se confier parce qu’il est là en tant qu’ami. Peut-être parce qu’elle sache qu’elle peut encore se confier à lui comme elle l’a fait lors de soirées partagées – qu’elle sache qu’il reste présent pour elle, malgré tout.

Il lui répond avec cette assurance légendaire qu’il ne fera jamais quelque chose qu’il regrette lorsque ça concerne la vie d’autrui. Il marque un point elle est chirurgienne et elle sait qu’elle n’a pas le droit de laisser le bénéfice du doute dans son travail. Elle abaisse légèrement ses paupières, hoche de la tête pour lui faire comprendre qu’elle partage son avis. La chirurgienne ne peut s’empêcher de soupirer, ce procès la met dans une position inconfortable et malheureusement ce n’est pas la seule chose dans la pièce qui ne la met pas à l’aise … « Ce n’est pas une bonne idée » lui fait remarquer Will lorsqu’il émet le souhait de rencontrer cet homme. La jolie rousse le regarde alors droit dans les yeux, le substitut ne met pas longtemps avant de céder à sa demande. Elle hoche de la tête machinalement lorsqu’il lui indique qu’elle ne peut pas le rencontrer sans la présence de son avocat. — Ça me va ! lui dit Kris comme pour lui faire comprendre qu’elle n’en attendait pas plus. William renchérit sur le fait qu’il pourrait organiser une rencontre. — Je veux bien, j’ai juste besoin de discuter avec lui pour essayer de comprendre ses motivations et de savoir que mon témoignage ne l’accablera pas davantage. fait-elle remarquer même si elle sait que Will n’est pas de cet avis. Elle n’a pas envie d’avoir ça sur la conscience même s’il est vrai que les choses auraient pu avoir une conséquence tragique si ça ne s’était pas passé de cette façon. Kristen est encore sous le coup de l’émotion d’avoir raconté ce qu’il s’est passé ce soir là. Alors qu’elle détourne le regard, Will vient la rejoindre en apposant sa main sur la sienne. Elle reste paralysée quelque seconde à peine perceptible sur ce geste. « Nous ne sommes qu’amis » se répète-t-elle dans sa tête car c’est ce qu’il lui avait fait comprendre lors de leur conversation sur la plage. Ces sentiments naissants n’étaient qu’à sens unique d’après lui même si après ce qu’il s’était passé à l’hôpital elle avait l’impression que Will ne voulait pas tout lui dire. Certes elle était très tactile avec Jack mais ils ont toujours eu une relation particulière. Est-ce que Will était un deuxième Jack ? À la différence qu’elle éprouvait une forte attirance pour le substitut qu’elle n’avait pas pour son meilleur ami (d’où son appellation). Les paroles du quarantenaire la sortent de ses pensées. Il lui indique qu’elle n’est pas obligée de témoigner. — Je crois que je vais prendre ta proposition je ne me sens pas capable d’aller témoigner à la barre. finit-elle par l’avouer. Elle pensait l’être en arrivant ce matin mais elle n’a pas envie d’étaler ces émotions dans un tribunal pas quand c’est si personnel. La dernière fois qu’elle l’a fait, ça s’est soldé par un divorce. Il la regarde, lui caresse la main. Si elle se sent dans la confusion, elle ne peut s’empêcher d’apprécier ce moment. Elle accepte le verre que lui tend Will et bois quelques gorgées d’eau. Le substitut lui demande alors comment sont ses nuits indiquant qu’il le faisait en tant qu’ami. Kristen n’a pas vraiment envie de s’étendre sur la question tout simplement parce qu’elle a du mal à s’imaginer se comporter en tant qu’amie après tout ce qu’il s’est passé entre eux. — Ça va, comme j’ai dit plus de peur que de mal finalement dit-elle comme pour reprendre ses dires de l’hôpital. — Si on a fini, je vais y aller. Tu n’auras qu’à m’envoyer un sms pour me dire quand tu as programmé le rendez-vous avec ce Column dit-elle en se levant du canapé avec une envie de quitter très rapidement la pièce comme si elle fuyait toute proximité non professionnelle avec Will.