loin des regards armés // william & winston

On joue à un jeu permanent. Dans notre coin on tente de chrecher le bonheur. Je l'ai perdu. Soleil imposant dans ce ciel bleu de Miami. Ville ensoleillée et pleine de monde joyeux. On veut recommencer cette vie, sauf qu’il n’y a plus de Game over, try again. Alors le Soleil il continue de chauffer les rues bordées de palmiers, et les buildings imposants. La ville vit, et meurt. On en fait notre métier. Notre quotidien. Et ça nous ronge de l’intérieur. J’en ai fait ma machine de guerre, raison pour laquelle je me lève tous les matins. Et je me levais sans avoir le mot échec en tête, surtout depuis ce fameux jour. Noir de jour, tristesse envahissante. J'ai toujours marché seul malgré tout. Même si cette autre moitié que représentait ma fiancée était toujours là, je restais seul au fond de moi. Je ne faisais plus vraiment de rêves, j'en ai même oublié le sentiment d'en faire. Ça faisait bien trop longtemps. Je ne faisais pas non plus des cauchemar cela dit, mais tout semblait vide. La journée les mots fusent, les attaques, les défenses, tout en même temps. Pourtant la nuit je ne trouve plus les mots. Comme si tout s'évaporait, parce que finalement je ne joue qu'un jeu, chaque jour dans ce tribunal. C'est un spectacle dont je suis le héros. Une fois entre ces quatre murs, les rideaux se plient et tout s'éteind. Ma vie tournait autour de ces pièces de théâtre, autour de nombreux clients. Vie très mouvementée. Je n'avais plus le temps à penser à autre chose que ces affaires qui se suivaient. Et je reste seul à nouveau et toujours. Je n'avais besoin de personne de toutes façons. Je ne pouvais compter que sur moi-même.

 Il n'y avait pas un jour où rien ne pressait, où rien ne se bousculait. Il y a ce jour précisément où rien ne changeait. Comme d'habitude les avocats bossaient dans leur bureaux, se battaient avec l'équipe du procureur, et donnait l'impossible à faire à leur assistants. Quelle routine. Entre temps on essaie de respirer. Ce n'était pas les affaires qui manquaient à Miami, loin de là. C'était une des raisons principales pour lesquelles j'ai emmenagé ici près de l'océan atlantique et des palmiers. Pourtant cette ambiance estivale ne s'accordait pas réellement à mon caractère. Je m'y suis fais depuis toutes ses années, j'y ai construit une routine, une vie malgré tout. Pendant quelques temps j'ai longuement hésité à partir. Trop de lourd souvenirs. J'ai trouvé l'excuse de ne pas avoir le temps de partir pour me faire à l'idée que je m'y étais attaché sans trop l'assumer. Et puis j'y avais un réseau, enfin des amis si je pouvais les appeler de cette manière. Comme d'habitude, je sortais de la salle d'audience, concentré et quelque peu satisfait. Parce qu'il y avait toujours cette part d'insatisfaction même quand je gagnais le procès. Comme si rien ne pouvait être parfait. Visage fermé, il était temps de rentrer. Pas si vite. Même si nous étions loin des regards armés, il y en avait un qui en avait toujours pour moi. "Montgomery." souriais-je presque en le saluant. "Es-tu venu te réjouir ou me demander une énième fois de rejoindre votre belle équipe ?" Cette fois-ci il agite drapeau blanc, peut être devrais-je faire de même depuis le temps.

 Être avocat. C'est un métier très attractif à vrai dire. Tout ceux qui se lancent ont des objectifs différents. Ils ont des desseins qui se lient à d'autres destins. Moi j'ai toujours voulu faire ça. Presque comme par hasard et pourtant c'était comme si j'étais fais pour ça. Je me battais pour ça. Souvent ça fait mal, mais souvent ça nous rend fier, ça nous fait nous sentir utile. Besoin d’une reconnaissance certaine. Il y a aussi et surtout des rencontres. Souvent celles qui sont inattendues. Éternel solitaire qui ne jure que par lui même. Je ne m’attendais pas à lier des amitiés. Surtout dans ce milieu. Il y a des amitiés superficielles, il y a des amitiés compétitives. Souvent on nous crache dessus, beaucoup de fois on veut nous écraser, nous traiter d'hypocrites. Mais il y a ceux qui veulent défendre. C'est le mot avant tout. Défendre. Pour ma part c'était le plaisir de jouer au tribunal, éplucher les dossiers jusque tard, peu importe les clients. Et surtout, plus ils étaient gros, mieux c'était. Il y avait William qui l'avait surement remarqué. Il insistait pour que je le rejoigne. Ce n'était pas le bureau du procureur qui m'attirait. On est de l'autre côté sur l'échiquier, et l'action se vit différemment. J'appréciais malgré tout William au fond, j'avais du respect pour lui. Chaque jour je restais brisé. Je ne changeais pas, je ne changerais pas. Je ne pense plus à grand chose autour de moi finalement. Je repensais étrangement à mon enfance. Inhabituel. Pensées presque évasives, je repense à mes parents. Je ne voulais pas devenir comme mon père. Un homme quelque peu fermé à lui même, qui toute sa vie n'a fait qu'une chose encore et toujours cette routine mordante derrière son écran. Mais j'avais du respect pour lui malgré mon ressentiment. C'était ce qui me donnait la force dira-t-on. Je ne voulais repenser à cette chute, cette dégringolade sentimentale à laquelle j'ai fais face il y a pas si longtemps que ça.

 William me faisait sortir de mes pensées. "Ça ne m'étonnerait pas" William ne cachait pas son envie de me voir rejoindre son équipe. Ce n'était pas pour moi, pensais-je. Solitude incarnée. "Je n'ai apparemment pas le choix. Le verre sera bû chez moi de toutes façons. C'est pas faux." Je n'étais pas si surpris de sa proposition, et je me trouvais malgré tout content de le suivre. Un verre ne pouvait pas se refuser. Sourire au coin quand il prononça le mot victoire. Partie facile pour moi. Un claquement de doigt et le jury ne fixait que nous. Les procès se défilent de jour en jour, et mes regards se posent sur ceux qui sourient, et ceux qui pleurent. Peu importe de quel côté nous nous trouvons. La sentence a été prononcée, la justice s'est montrée à son plus beau jour à Miami. Il était temps de se poser. Souffler. Sensation de soulagement qui ne trompe pas quand on s'assoit. "Merci" Regard quelque peu suspect. "T'essaies de m'amadouer là ?" Je souriais sans discrétion. Petit sourire au coin qui signifie beaucoup de choses à la fois. "L'affaire était déjà dans notre poche, alors pas la peine de s'attarder sur ces détails." lui répondais-je. On parlait toujours boulot. Nous vivions boulot. C'était purement professionnel entre nous pour le moment. Je ne l'avais jamais vraiment envisagé comme ami, peut-être que ça changera. Les verres arrivent jusqu'à nous. Une gorgée pour cette victoire. "À la victoire." Clin d'oeil en prenant cette première gorgée. "Et toi alors comment ça se passe de ton côté ?" Une curieuse envie. Peut-être une fausse curiosité pour s'en vanter.