Être humain. Défendre des êtres humains, quels qu'ils soient. Encore une courte nuit à se demander quelle sera la prochaine affaire, le prochain scandal. Soulagement impossible. Puis toujours ce deuil qu'on n'arrive pas à chasser, qu'on n'arrive pas à faire. Solitude imposée depuis tout ce temps. Est-ce qu'on peut toujours nous sauver ? J'en doutais de plus en plus. On pense toujours à demain. On aimerait bien qu'il change. Coeur dur. Cette patience qui veut nous pousser plus loin, le temps qui nous détruit à petit feu. Patience qui s'installe. Temps agité. Coeur froissé. L'innocence nous fait de l'oeil. On la cherche chaque jour, pour au final nous faire culpabiliser. Je la rejetais cette culpabilité. J'avançais quoiqu'il arrive. Demain est un autre jour, qui pourtant ressemblent aux autres depuis qu'on a adopté cette nouvelle routine incessante et mordante. Elle mord notre quotidien chamboulé. Café siroté, on ne réfléchit plus trop pendant que la télévision couvre ces pensées. Quelle banalité. La routine elle a changé depuis un certain temps. On en devient de plus en plus méfiant. Mais il reste toujours cette satisfaction quand on gagne à la cour. On parade. Déguisement des sentiments inavoués.
Vision comme une hallucination. Voilà ce passé qui refait surface. Court instant qui trottait au fond de ma mémoire. Court instant du passé qui fait claquer ses talons sur ce sol. Le feu. On se brûle vite.
On ne vole pas très haut. On ne tente même pas à vrai dire. On se lève pour défendre, on essaie de se recoucher avec cette tête pleine. Dans cette ville on pourrait se perdre. Pourtant elle a l'air paisible. Elle parait tranquille. Mais derrière le décor on entend les sirènes gronder, les services d'urgence courir telle une fourmilière, et même des tirs tandis que la balle ne rebondit plus car généralement elle se réfugie dans cet épiderme si fragile.
Vision telle une illusion. Ce passé à travers la brunette que j'ai en ligne de mire cette fois ci. Il commence à faire chaud, la foule ne pense plus à rien. Je passais pas là, devant ce pub où l'ambiance n'est plus à doutée. La brune qui n'avait pas changé. Je me demandais si j'allais bien, puis me demandais si elle allait bien. Parce que c'était bien réel finalement. Passé qui refait surface à une période pas vraiment rose et radieux. Après tout je m'étais concentré que sur le boulot, les procès, la défense, les victimes. Je ne me trouvais qu'au milieu de ces paperasses et cet engouement qu'on a instinctivement au tribunal. Quelle adrénaline. Cette dernière a changé à cet instant où je l'ai croisée. Maxine qu'elle s'appelait. Ça faisait bien longtemps. Un sentiment que j'avais oublié de ce point de vue. Un sentiment que j'avais mis de côté exprès.
"Maxine ?" je l'interpelle, ce qui n'est pas dans mes habitudes.
"Ça fait longtemps. C'est Winston." Vous savez ce petit moment de gêne quand on retrouve une ancienne aventure. Je ne savais pas si elle se rappelait de moi, de mon côté ce flou s'était dissipé en un instant.
(c) AMIANTE