Appart Solal feat Harry Lopez

I push through the pain, rise from the flames that’s how you know I’m a fighter. You won’t see me quit, no I’m not giving in, that’s how you know I’m a… Elle lip-sync la chanson diffusée sur les hauts parleurs de sa radio, le doigt tournant la page du dossier qu’elle relit. A côté d’elle, son calepin avec la liste des flics au courant de la descente de l’entrepôt de deux semaines auparavant – celle qui a capoté parce que quelqu’un avait prévenu le gang. Il y a trop de noms présents, trop de possibilités de taupe pour l’autre camp et elle passe la langue sur les dents. Elle a mis certains noms entre parenthèse – soit parce qu’elle les connaît bien et aime à croire que sa capacité de jugement n’est pas mauvaise comme Andy, soit parce qu’elle les a vu s’acharner pour aider le reste de leurs collègues sortir de l’entrepôt comme Burns. Mais ce n’est pas suffisant pour totalement les écarter de la liste des suspects, elle en a conscience et c’est pour cette raison qu’elle mène une fausse enquête en parallèle (ça et parce qu’elle n’a pas totalement confiance dans les affaires internes pour les laisser faire leur boulot). Elle se pince le nez lorsque son téléphone vibre. Un message de Solal et un sourire étire ses lèvres – il a le chic pour lui proposer le genre de soirée dont elle a besoin quand elle en a besoin. Elle n’a pas besoin de réfléchir pour accepter sa proposition, donne une vague estimation de son heure d’arrivée chez lui et abandonne, non sans un certain pincement au cœur un peu coupable, sa paperasse pour faire claquer la porte de son appartement derrière elle.

Elle s’est arrêtée en chemin pour acheter un pack de bières, de quoi se désaltérer tout en matant la dernière série que le chef cuisto tient à lui faire découvrir. Et quelques paquets de friandises sucrées parce que même si elle sait qu’elle peut compter sur Solal pour avoir préparer un festin, elle sait aussi qu’ils auront envie de grignoter quelques bonbecs et autre pop corn une fois qu’ils auront le ventre bien plein (elle sait aussi qu’elle le regrettera le lendemain mais elle s’est empêché de culpabiliser de son achat en se répétant que c’est uniquement pour cette soirée-là et que ça fera pour les journées de merde qu’elle a eu pendant deux semaines).

La porte s’ouvre et elle lève les bières, n’a toutefois pas le temps d’en placer une qu’il la bombarde déjà de questions. Pour y répondre tout seul. Elle lève les yeux au ciel, Harry, incapable pourtant d’empêcher un sourire en coin de venir fleurir son visage. « Juste parce que je garde la ligne ne veut pas dire que je ne mange rien tu sais. » Elle lui lance un regard faussement vexé – sûrement parce qu’il sait qu’elle peut être pire qu’un ogre quand il s’agit de se remplir la panse avant de poser les bières sur le comptoir de la cuisine. « J’ai amené de quoi nous désaltérer le gosier. Et des renforts, » ajoute-t-elle avant de sortir les sachets de bonbons de ses poches avec un air coupable. « Mais sinon, non, j’ai pas encore mangé. Mon estomac devait se douter que tu m’inviterais. » Un clin d’œil et elle se débarrasse de son blouson pour le poser sur une chaise proche, s’installe sur le canapé confortable avec un petit soupir d’aise et lorgne le cuisinier. « Whaaaat ? Hé ho, spoiler alert mister, je veux rien savoir de ce qu’il se passe ! » Elle a le doigt levé, menaçant ou presque, mais il s’enfuit déjà en direction de la cuisine. « Héééééé ! T’en as juste trop dit, là déjà, faut que tu craches le morceau maintenant ! » Seul le rire de Solal lui répond et elle lève de nouveau les yeux vers le plafond avant d’aller chercher deux bières qu’elle décapsule rapidement. « Bière, bonbons pour après et tes bons plats ? Je ne pourrai être une femme plus comblée, mon cher. » Qui a besoin d’un mari et de gosses quand on peut avoir des soirées juste chill comme celle-ci, Harry l’ignore. Sans doute qu’elle se contente de bien peu – et ça lui suffit bien plus que largement. L’odeur du plat lui parvient et elle s’approche du jeune homme, zieute ce qu’il a préparé. « Qu’est-ce que t’as concocté ce soir ? » Elle pose une bière du côté de Solal sur la table basse, garde l’autre entre ses mains pour en boire une première gorgée.

Son rire éclate dans l’entrée de l’appartement, pas totalement l’une de ces esclaffades dont elle détient le secret mais un véritable éclat de rire tout de même. C’est presque devenu une habitude, en réalité, de se ramener chez Solal armée d’un paquet de bonbons ou d’un quelque chose à grignoter pour venir compléter les repas qu’il lui prépare à chaque fois – sa façon à elle de le remercier sans jamais vraiment avoir à prononcer ces mots-là. Un rappel, aussi, de l’enseignement de ses parents durant son enfance : ne jamais se ramener chez quelqu’un les mains vides, surtout quand on a été invitée. Elle se doute qu’elle pourrait s’en passer (c’est Solal, après tout, elle se sent presque chez elle, chez lui) mais c’est devenu un réflexe, un geste effectué sans presque jamais le réfléchir alors elle ne cherche pas à se retenir. Le chef cuisto disparaît dans sa cuisine quand elle débarque dans le salon, le blouson déposé sur un dossier de chaise, deux bières attrapées pour préparer la soirée. Elle secoue la tête à son compliment, le rire au bord des lèvres, à tout juste le temps de lever une main pour gratter sa joue barbue qu’il file de nouveau. « Si tu crois que me complimenter va me faire oublier que tu étais à deux doigt de me spoiler, tu te fourres le doigt dans l’œil, mon coco. » De deux doigts, elle lui indique qu’elle le surveille, se parant de son regard le plus sérieux et le plus menaçant qu’elle soit capable ce soir. Elle se détourne rapidement, se laisse tomber sur le canapé avec un soupir d’aise, ferme les yeux une fraction de seconde – mama, que ce canapé est une bénédiction. « Tu l’as acheté où ton canap’, au fait ? Va falloir que je pense à changer le mien et vu que le tient est parfait pour chiller, je pense que j’vais me fournir là où tu t’es fourni. » Elle étend les bras, se force à soulever les paupières. Gash, elle pourrait s’endormir sur ce canapé et être certaine de ne même pas avoir le dos en compote au réveil (pas sûr, en revanche, qu’elle retourne bosser un jour).

« Aaah, je me disais bien que tu faisais partie de ces hommes qui avaient un but dans la vie, » rit-elle en roulant des yeux. « J’ai peur d’avoir besoin de davantage d’action, mais t’es en passe de devenir l’homme le plus bénis de la planète, trust me. » Après son petit frère – même si elle prétendait le contraire, elle savait bien que la place de numéro un avait été dérobé à la naissance de cette tête de linotte qui lui servait de frère cadet. « Par contre, maintenant que t’as lancé le sujet, je dois reconnaître que j’suis surprise qu’il n’y ait pas tout un harem qui frappe à ta porte pour essayer de te séduire. » Elle lève en regard inquisiteur vers lui, la question silencieuse flottant entre eux. Elle se redresse, hume l’assiette qu’il vient de déposer devant elle, le ventre grognant de plaisir à l’idée de pouvoir déguster un nouveau plat made-in-Solal. Fourchette dans une main, elle la plante dans un aliment avant de zieuter le cuisinier. « En tout cas, ça sent super bon et il paraît que c’est bon signe. » Elle minaude, joue la comédie mais sait que ça ne pourra pas être dégueulasse – déjà parce que si ça l’était, elle est certaine que Solal n’aurait pas pu devenir cuisto, moins encore ouvrir son propre restaurant et aussi parce qu’elle est loin d’être difficile dès qu’il s’agit de nourriture. A partir du moment où ça se mange, elle engloutit.

« T’es p’t-être devenu Hulk pendant la nuit, » claque-t-elle du tac-au-tac avant de palper le biceps de son pote et de secouer la tête. « Nah, rien à craindre, t’es pas prêt de te transformer en géant vert. » Elle s’autorise un petit clin d’œil, glousse de sa connerie avant de porter sa bière pour la cogner contre celle de Solal. « Je l’avais décapsulé, je sais bien que t’as des habitudes de Prince, mon cher. Allez, cheers. » Elle fait se rencontrer les deux gulots avant de porter le sien à ses lèvres pour avaler une rasade de bière et de pointer l’écran de sa fourchette. « Eeeet du coup, ça parle de quoi ta série, au fait ? » Qu’elle sache si elle devait activer son cerveau en mode Westworld ou si elle pouvait le laisser dormir comme devant Gossip Girl.