Une soirée en amoureux - John.

Il n’y a rien de mieux qu’une journée qui commence en sachant qu’elle se finira par une soirée en tête à tête avec Jensen. Tu aimes tes enfants plus que tout mais des fois, tu as besoin de passer du temps avec ton compagnon. L’arrivée d’enfants dans votre dynamique de couple n’avait pas été simple à gérer dans un premier temps car les enfants qui vous étaient confiés par les services sociaux étaient des adolescents qui n’étaient pas toujours simples à gérer. Mais il en fallait plus que cela pour vous décourager et au fil des mois, vous avez su trouver le bon équilibre. Voilà pourquoi il y a quelques jours tu avais proposé à Jensen une soirée en amoureux. Le plus quand vous avez des adolescents à la maison c’est qu’ils n’ont pas besoin d’une babysitter. Yashem pouvait s’occuper de sa petite soeur, les deux aînés ayant quitté le nid. Mais vos deux rejetons trouvèrent eux aussi de quoi occuper leur soirée étant invités chez des amis. Le fait que la maison serait complètement vide, à votre entière disposition ne t’avait nullement échapper et c’était assez rare pour que tu comptes en faire très bon usage après votre dîner. Mais avant d’arriver à ce dîner, il fallait traverser la journée. Tu t’occupais de préparer le petit déjeuner des enfants quand Jensen rentra épuisé de sa garde. Tu l’envoyais se coucher sachant très bien qu’il saluerait les enfants avant de s’effondrer. Tu t’occupais de les amener à l’école avant de partir au cabinet où t’attendait ton premier rendez-vous. Enchainant les rendez-vous, les heures passaient les unes après les autres sans que la journée ne s’allonge. Ta bonne humeur ne passa pas inaperçue auprès de tes collègues qui te taquinèrent sur tes plans en soirée. Même si elle ne te le dira certainement jamais, ta dernière recrue, tout juste passé la trentaine était toujours surprise que tu te comporter comme un adolescent qui se rend à son premier rencard quand tu as une soirée avec Jensen après quatorze ans de relation. Cela t’amuse beaucoup mais elle finira par s’y faire tu n’en doutes pas.

Ayant veillé à ne pas avoir de rendez-vous trop tardif aujourd’hui, tu as quitté le cabinet assez tôt pour rejoindre votre villa où Jensen t’attendait. Déjà prêt quand tu passais le pas de la porte, tu déposais un léger baiser sur ses lèvres pour le saluer avant de disparaître dans votre salle de bain pour te préparer. Tu n’avais pas manqué de remarquer que Jensen, bien qu’habillé simplement, était très agréable à regarder. Tu allais te faire un plaisir de le sortir de ses vêtements mais plus tard, d’abord il fallait manger. Tu suivis son exemple tu enfilais un jean habillé que tu accompagnais d’une chemise. Il ne vous fallut pas plus d’une trentaine de minutes ensuite pour rejoindre le restaurant et être installés. Une fois les menus devant les yeux, Jensen te demanda : « Comment a été ta journée ? Le cabinet se porte bien ? » Un sourire se dessina sur ton visage. Vous n’aviez pas pris le temps de beaucoup discuter depuis que tu étais rentré du boulot. Jetant un dernier regard sur le menu, tu décidais d’un plat avant de le refermer et de porter toute ton attention sur ton compagnon. « Ma journée s’est très bien passée. Mes collègues n’ont pas arrêté de se moquer de ma bonne humeur mais je pense qu’ils sont juste jaloux de n’avoir personne qu’ils ont envie de retrouver autant que moi quand je rentre. » Lui dis-tu avec un clin d’oeil. Tu étais conscient que ce que tu partageais avec Jensen n’était pas courant, que vous aviez de la chance et tu comptais bien le préserver. « Le cabinet se porte très bien ! Les rendez-vous ne manquent pas et notre dernière recrue se fait sa place petit à petit. Je ne pense pas avoir à chômer avant la retraite. » Dis-tu en plaisantant avant d’ajouter : « Et toi ? Comment se sont passées tes gardes ? Tout va bien à la caserne ? » Cela fait plusieurs années que Jensen a rejoint les rangs des pompiers de Miami et tu as appris une chose depuis c’est que la caserne c’est comme une grande famille. Une famille dont tu fais partie par extension d’ailleurs. Tu fais tout pour ne pas manquer un évènement là-bas, tu sais à quel point cela compte pour Jensen. « Les enfants allaient bien ? Mary n’étaient pas trop triste qu’on l’abandonne ce soir ? » Tu connaissais déjà la réponse tellement elle était excitée ces derniers jours d’aller dormir chez son amie.

Quatorze ans de vie de couple, il fallait avouer que tu n’avais jamais pensé en arriver là avec Jensen. Tu te souviens très bien des débuts de votre relation, sa détermination à affronter tous les obstacles que la société allait vous mettre dans les pattes. Parce qu’en plus d’être deux hommes, un fait pas si couramment accepté que cela à l’époque, votre différence d’âge était plus que significative. Pour Jensen, cela n’a jamais semblé avoir une quelconque importance mais cela en a eu pour toi au début. Et encore aujourd’hui des fois dans des moments de remise en question, des moments de faiblesse. Mais tu n’échangerais ces quatorze années pour rien au monde parce que même si cela n’avait pas été facile tous les jours, avoir Jensen à tes côtés et construire une famille avec lui, cela en valait le coup. Installés à table dans ce petit restaurant italien, c’était le moment de faire le point sur la journée mais plus généralement sur les sujets qui vous tenaient à coeur. Ecouter les gens parler était ton métier, chercher ce qu’ils essayaient de te dire sans le dire était une seconde nature mais tu savais à quel point cela pouvait être pénible pour ton entourage et tu essayais donc de ne pas le faire, particulièrement avec Jensen même si c’était certainement la seule personne qui te le pardonnerait facilement. « C’est vrai que c’est moche d’être jaloux comme ça. » Tu laissais échapper un petit rire à ces paroles. Moche n’était peut-être pas le bon mot mais tu t’amusais de cette fausse jalousie car tu savais que tes collègues étaient heureux pour toi. Construire une équipe fiable sur laquelle tu pouvais compter n’avait pas été simple quand ton partenaire s’était retiré du cabinet mais tu avais réussi. Ce fut à ton tour de prendre des nouvelles de la caserne et des pompiers qui y gravitaient avec ton homme. « C’était un peu mitigé. Logan est pour l’instant toujours en arrêt maladie et ça vaut mieux. Je préfère qu’il s’en remette doucement mais sûrement. Il y a quelques tensions à la caserne, avec toutes les violences ça n’est pas évident de faire comprendre que nous sommes des cibles désormais, mais que la chose que l’on peut vraiment faire, c’est attendre que ça passe. On a tenté d’en parler avec la hiérarchie, mais pour le moment ils ne semblent pas vouloir bouger. » Tu grinces des dents, c’est plus fort que toi. En temps que compagnon d’un pompier, tu n’avais pas pu passer à côté des violences diverses et variées dont ils étaient la cible. Que des individus de la ville veuillent s’attaquer à des hommes et des femmes qui avaient pour mission de les aider et de les sauver était incompréhensible pour toi. Tu n’avais jamais adhéré aux valeurs familiales de la police mais tu respectais profondément les valeurs défendues par ton père, ton frère et tes neveux. Savoir que la ville ne faisait rien pour protéger Jensen et ses hommes te mettait hors de toi. « Il faut continuer à se battre pour leur faire comprendre et rester soudé. Je ne comprends pas pourquoi on s’attaque à vous. » Dis-tu en posant ta main sur celle de Jensen, impuissant. « J’en parlerai à mon frère. » Ajoutas-tu parce que tu espérais que la police était sur le coup. Tu ne pus t’empêcher de penser à ton père, ce père que tu ne voyais presque jamais mais dont ses nombreuses années dans la police et son rang aujourd’hui, même retraité, amenait un certain nombre de connexions. Voilà une visite que tu n’avais guère envie de faire mais perdre Jensen était une idée bien pire que d’affronter ton homophobe de père. « Et toi ? Comment tu vis ça ? » Demandas-tu au jeune homme. Parce que la caserne c’était une chose, Jensen en était une autre. La conversation se tourna ensuite vers un sujet bien plus joyeux car il s’agissait de vos enfants. « Ils allaient très bien et étaient contents d’aller chez leurs amis. Pour Mary, tu sais comment elle est. Dès qu’elle a vu son amie, je n’existais plus. Ils grandissent trop vite. » Tu n’avais aucun mal à imaginer la scène que Jensen était en train de te dessiner. Mary, votre merveilleuse petite Mary à qui vous aviez rendu un brin d’insouciance était le rayon de soleil de votre petite famille. « Ils grandissent beaucoup trop vite … Puis ça veut dire qu’on se fait vieux nous aussi, enfin surtout moi. » Dis-tu avec un sourire en coin sur les lèvres. Les blagues sur ton âge étaient courantes chez vous depuis que tes neveux les avaient lancées des années auparavant. Le sujet de l’âge des enfants te ramena à des réflexions que tu avais eues ces derniers temps. Maintenant que Sam et Emery commençaient leur vie de leur côté et avec Yashem qui allait vous quitter, tu n’avais pu t’empêcher de penser à un autre enfant, adopté ou créé avec une partie de vous, incapable de le chasser de ton esprit. Tu n’étais pas certain que ce soit une bonne idée, que vous étiez prêts mais ça te traversait l’esprit. « Au moins la maison sera calme ce soir quand on rentrera. » Un sourire en coin vint se dessiner sur ton visage. Ce n’était pas comme si tu n’avais pas réfléchi à cet avantage. « Je compte bien en profiter. » Dis-tu à Jensen avec un clin d’oeil. Ton compagnon n’eut pas le temps de répondre que la serveuse revint pour prendre vos commandes. Tu commandais des pâtes à la carbonara et tu laissais Jensen commander de son côté avant de commander deux verres de vin pour accompagner ce dîner. Une fois la serveuse repartie, tu demandais à Jensen : « Est-ce que tu as quelques jours de congés en stock ? » Ils étaient rares dans ce pays mais tu avais envie de partir en vacances en famille cette année peu importe que cela fasse grogner tes aînés.

Quand on grandit dans une famille qui exerce un métier au service du peuple, on comprend très vite que l’on peut se réveiller un matin ou rentrer de l’école un soir et avoir perdu un parent ou un proche. C’est dans cette réalité que tu as grandi, voyant les amis de famille tomber sans réelle raison et tout cela au service des civils de Miami. Tu te souviens des histoires de supers héros que ton père vous racontaient. Il cherchait certainement à vous préparer pour la carrière qu’il souhaitait vous voir emprunter. Cela fut un échec de ton côté mais tu adorais ces histoires. Quand Jensen t’a confié vouloir rejoindre les rangs des pompiers, tu savais exactement dans quoi il était en train de se lancer. Tu savais que tu passerais des nuits à te demander si tu reverrais ton compagnon le lendemain ou si tu le perdrais dans un feu ou d’une autre manière plus cruelle encore. Ce que tu n’avais pas envisagé à ce moment là c’était que des habitants de Miami puissent vouloir tuer Jensen. Le prénom de Logan te faisait encore froid dans le dos. Ce qui était arrivé au jeune homme te glaçait le sang et tu priais tous les jours pour que Jensen ne soit pas touché, lui et Hunter par la même occasion. Emery avait perdu trop de proches, les deux hommes de sa vie n’avaient pas le droit de l’abandonner eux aussi. Alors oui, tu étais inquiet, ton côté protecteur ne pouvait s’empêcher de rester à l’affut mais la vérité c’était que tu étais impuissant face à cette situation, aussi impuissant que ton homme. Tout ce que tu pouvais faire c’était l’épauler et alors qu’il te parlait de Logan, tu pouvais lire la culpabilité sur son visage. Jensen avait toujours eu un complexe de héros, c’était un côté de sa personnalité que tu admirais mais des fois, elle lui pourrissait la vie. « Tu es sûr ? Je ne sais pas s’ils peuvent vraiment quelque chose pour nous tu sais. En général, les sirènes font fuir ceux qui nous agressent et le temps que la police arrive, il n’y a plus personne. » Non, bien sûr que non tu n’étais pas sûr. Mais Jensen ne t’avait pas bien compris. Tu ne voulais pas que ton frère se mette à envoyer des brigades à la rescousse toutes sirènes dehors. Tout ce que tu voulais c’était t’assurer que la police avait bien pris la mesure de la menace qui pesait sur les pompiers de la ville et qu’ils faisaient tout pour remonter la trace de ces violences pour y mettre un terme. N’était-ce pas pour cela que vous payiez des impôts ? « Je suis d’accord avec toi, ce n’est pas la solution. Je veux simplement qu’il me confirme qu’il a des hommes sur le coup, que ça avance et qu’ils essaient d’y mettre un terme. » Pour ce qui était des inquiétudes de Jensen sur sa hiérarchie, c’était une autre paire de manche mais tu n’avais jamais été le genre d’homme à baisser les bras et tu comptais bien user de toutes les cartes que tu avais en main pour que ces chers bureaucrates ne puissent plus nier l’évidence. « Moyennement bien. Je prends sur moi et j’attends que chacun dise ce qu’il a à dire. Pour le moment tout le monde reste silencieux et sens qu’il va y avoir quelqu’un qui va finir par éclater et je vais devoir me retrouver au milieu pour calmer les tensions. » Jensen avait été si fier de gravir les échelons de ce métier qu’il aimait tant. Mais chaque rôle vient avec son lot de responsabilités et il avait raison, si les tensions finissaient par éclater, il lui faudra jouer le rôle de médiateur. Un rôle pas toujours facile à endosser. « Si ça peut t’aider, on peut en discuter quand tu veux d’accord ? » Dis-tu à Jensen en serrant légèrement ta main dans la sienne. Tu aimerais tellement pouvoir faire plus pour épauler Jensen dans cette situation malheureusement, tu n’étais pas détective, tu ne pouvais arrêter personne alors il fallait être patient, espérer que la police ferait bien son travail. « Je ne sais pas si c’est une bonne idée mais on peut organiser un barbecue chez nous, avec tes collègues pour que vous puissiez souffler un peu. » Proposas-tu en haussant les épaules. L’idée t’était venue sur le moment, tu ne savais pas ce qu’elle valait ou si c’était brillant mais c’était ta manière à toi de faire ce que tu pouvais en dehors du travail de fond que tu comptais faire dans ta famille et dans les milieux de pouvoir si tu arrivais à les atteindre. La conversation se tourna ensuite vers les enfants, sujet qui amenait toujours un sourire sur ton visage. Un sujet qui amena celui de ton âge, certainement ce qui t’empêche de parler à Jensen de cette envie d’une nouvelle adoption, d’un nouvel enfant. « Tu es comme le bon vin John. Tu te bonifies avec l'âge. » Laissant échapper un petit rire, tu laissais la serveuse vous interrompre. Vous passâtes commande sans hésitation et bientôt la serveuse vous quitta pour revenir quelques minutes plus tard avec les deux verres de vin alors que tu demandais à ton compagnon s’il avait des vacances à prendre dans les prochains mois. « Oui. Il me semble que je dois avoir deux semaines ou peut-être un peu plus que je peux poser. Pourquoi ? Tu as quelque chose en tête ? » Tu hausses les épaules. Non, tu n’as rien de prévu. Juste l’envie de partir avec Jensen et les enfants, de vous offrir ce voyage. S’il y a bien un avantage à ton métier c’est que tu gagnes bien ta vie, très bien même alors tu n’hésites jamais vraiment quand l’envie se présente. « J’aimerais que l’on parte tous les six en vacances. Je n’ai pas de destination en tête, si tu rêves d’aller quelque part je t’écoute sinon on peut demander aux enfants. » Dis-tu avant de prendre une gorgée de vin. « Tu as eu Sam ou Emery au téléphone ces derniers jours ? » Tu n’avais eu droit qu’à quelques textos, des bribes de communication auxquels tu étais habitué et dont tu te formalisais car ils se rattrapaient quand ils passaient à la maison. Avant que Jensen ait eu le temps de te répondre, la serveuse arriva avec vos plats et vous pûtes commencer à manger.

Dans un couple, on ne peut pas partager seulement les bons moments. Bien sûr, ce sont de ces moments que l’on veut se souvenir mais la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Cette menace qui s’intensifie sur les pompiers est une menace qui commence sérieusement à peser sur votre famille. Pour l’instant, vous en aviez peu parlé, les attaques encore rares mais celle subie par Logan avait certainement été celle de trop, celle qui avait laissé place à une réelle inquiétude. Il était évident que Jensen était bouleversé par la situation même s’il ne s’épanchait pas sur le sujet. Tu espérais que ce qui se préparait ne rappellerait pas trop de mauvais souvenirs à l’homme que tu aimais. L’armée ne laisse aucun homme indifférent et tu avais dû calmer bien assez de crises de paniques de Jensen au fil des années pour voir les dégâts que pouvaient laisser derrière elle cette institution si vénérée dans le pays. Loin de toi l’idée d’être antimilitariste, tu espérais simplement que tes enfants voudraient faire autre chose de leur vie c’est tout. « Merci. » Tu hoches la tête sans rien ajouter. Quand tu auras parlé à ton frère et certainement à ton père, tu en reparleras à Jensen, pour l’instant, il n’y avait rien à ajouter. Tu préférais montrer à ton homme que tu étais là pour lui, que tu serais toujours là pour lui et en premier lieu pour l’écouter. Pour toi, parler était une seconde nature. Il n’était pas difficile de savoir ce que tu ressentais, tu n’avais pas vraiment de mal à t’ouvrir aux autres. Mais ce n’était pas le cas de ton compagnon qui avait toujours du mal à mettre des mots sur ce qu’il ressentait. C’était toutefois fortement nécessaire. « Je le ferai. J’en aurais besoin je pense. » Le forcer n’était pas une option. Tu voulais que Jensen le fasse de son propre chef. C’était toujours un moment émouvant pour toi parce que c’était une preuve de confiance hors pair à tes yeux. « Ca l’est. Se retrouver ensemble pourrait aider à montrer qu’on se soutien tous. Je vais en parler aux autres pour voir ce qu’ils en pensent. » La surprise que tu avais lue sur son visage, la reconnaissance que tu pouvais y lire désormais te faisait plaisir. Certes, l’organisation allait prendre un peu de temps si ses collègues étaient d’accord mais ce n’était pas vraiment une corvée que de passer la journée avec les collègues de Jensen et leur famille. Au fil des années, tu avais appris à les connaître, ces derniers devenant comme une sorte de deuxième famille. Tu étais habitué à ce genre de relation, c’était pareil chez toi en grandissant, quand tes parents organisaient des barbecues en invitant tous les policiers du commissariat. « Tiens-moi au courant. Je me ferai un plaisir d’organiser tout ça, j’embarquerai Emery avec moi pour m’aider, elle ne pourra pas dire non si elle veut nourrir son copain. » Dis-tu avec un petit sourire en coin sur les lèvres. Votre fille était si jeune mais déjà elle semblait décidée à passer sa vie avec Hunter. Parce que oui, tu ne doutais pas une seule seconde qu’elle dise oui s’il venait à lui poser la question. Et pourtant, tu ne peux t’empêcher de te demander si c’est une si bonne idée que cela. Ce n’est pas Hunter le problème, c’est juste qu’ils ont le temps non ? N’ayant pas vu ta fille depuis quelques temps, cela te fera une excuse pour passer un peu de temps avec elle. Le sujet des enfants fut rapidement mis sur la table et avec lui l’idée qui t’était venue de vacances familiales. « Pour Sam je n’ai eu que quelques textos. Pour Emery je l’ai eu au téléphone quelques minutes et elle va bien. » Tu hoches la tête, pas beaucoup plus de nouvelles que toi finalement. Il faut que tu passes voir l’un ou l’autre si tu veux un peu plus de nouvelles mais tu n’as pas toujours le temps et eux non plus. Les laisser quitter la maison, ne plus les voir tous les jours n’avait pas été simple pour toi. « Concernant les vacances c’est une bonne idée. Là comme ça je n’ai pas de destination en tête, mais je vais y réfléchir. Par contre pour les avoir tous en même temps, il va falloir qu’on voit nos emplois du temps respectifs. On devrait organiser un repas de famille pour qu’on puisse tous en discuter. Ca serait sans doute plus simple que de s’envoyer des messages. » Ton homme avait raison. Ce n’était de toute manière pas un sujet que tu avais envie d’aborder pour la première fois par texto. Malgré le fait que tu te considérais comme une personne connectée pour ton âge, ce n’était pas le moyen de communication que tu préférais, loin de là. Et avoir tous tes enfants sous ton toit pour quelques heures, cela n’avait pas de prix à tes yeux. « Il est évident que cela va demander un peu de préparation mais je n’avais pas prévu que nous partions dans une semaine. C’est le genre de vacances qu’il faut planifier à l’avancer et je ne vois pas pourquoi nous n’y arriverions pas. » Dis-tu en haussant les épaules avant de prendre une autre bouchée de ton plat. Tu étais d’un naturel optimiste, il était hors de question que vous annuliez parce que le patron de l’un et de l’autre refusait des vacances planifiées à l’avance. C’était l’avantage d’être ton propre patron. « Je ne dis jamais non à un repas de famille. Ca fait trop longtemps qu’on a pas eu tout le monde autour de la table. » Tout comme cela faisait longtemps que vous n’aviez pas fait une soirée en amoureux. Comme quoi, même à deux, vous parliez des enfants. « Les enfants te manquent ? » Avec Jensen, tu avais eu une chance énorme, à tous les niveaux. Sans le savoir, il était celui que tu attendais. Et comme toi, c’était un homme qui adorait les enfants. Vous aviez toujours su que vous en auriez, d’une manière ou d’une autre. Et ce n’est pas toujours très courant chez les personnes homosexuelles. « Pas là tout de suite, je suis assez content de t’avoir pour moi tout seul ce soir. » Lui dis-tu avec un sourire en coin avant d’ajouter : « Mais ne pas voir Emery et Sam tous les jours ça me manque, je ne peux pas le nier. » Dis-tu en haussant les épaules. « Des fois je … » Commenças-tu avant de décider que ce n’était peut-être pas le moment d’aborder ce sujet. « Ta pizza est bonne ? » Finis-tu par demander.

Après un sujet difficile, parler de vos enfants était toujours un moyen de vous redonner le sourire. Tu ne pouvais t’empêcher de penser à ta tante quand tu étais gosse qui aimait s’amuser avec ta mère et ses amies qu’elle et son mari se lamentaient de ne pas passer assez de temps tous les deux et quand ils le faisaient, ils parlaient des enfants parce que c’était ce qui leur restait en commun. Tu trouvais cela triste pour ta tante mais ce n’était pas complètement ton cas avec Jensen. Vous veilliez à ce que les enfants ne prennent pas tout votre temps, que vous puissiez exister en temps que couple avant d’être des parents. Mais vos enfants étaient désormais une partie importante de votre vie ce qui expliquait que vous finissiez toujours par y revenir. Les deux aînés avaient quitté la maison depuis plusieurs années déjà, une absence qui s’était faite sentir bien plus que tu ne l’aurais pensé mais l’arrivée de Yashem et Mary avait légèrement changé la donne. « Petit malin. » Le sourire qui s’était dessiné sur ton visage ne te quitta pas. Pris dans leurs vies de jeunes adultes, tes enfants n’avaient pas toujours le temps de venir vous voir alors si certains petits stratagèmes pouvaient passer inaperçu pour les convaincre de t’accorder un peu plus de temps que prévu, pourquoi s’en priver ? Tu savais tout particulièrement comment convaincre Emery de te donner un coup de main pour ce barbecue car finalement, elle était dans la même position que toi. Son petit ami pouvait se faire attaquer à tout moment, situation qui ne devait pas être facile à gérer quand ce dernier avait perdu sa soeur récemment. Le sujet des enfants emmena avec lui une certaine mélancolie et tu te repris peu de temps avant de dire à Jensen ce à quoi tu pensais ces derniers temps. Au regard que te jeta ton compagnon quand tu essayais de changer le sujet, tu compris qu’il n’allait pas te laisser t’en sortir comme ça. Mais il joua d’abord le jeu : « Très bonne oui et ton plat ? » Tu hoches la tête, Jensen a toujours été celui qui dénichait les bons petits restaurants, ce n’est pas étonnant que ce soit délicieux. « C’est excellent, tu as très bien choisi. Mais je pense que c’est le dessert que je préfèrerai. » Dis-tu un sourire en coin sur les lèvres. Tu crus pendant quelques secondes que Jensen allait te suivre sur cette idée mais non, il remit sur la table le sujet que tu avais essayé d’éviter. « Pourrais-tu terminer ta phrase s’il te plaît ? Des fois tu quoi ? » C’était certainement idiot d’essayer de l’éviter, tu ne savais pas pourquoi tu étais si nerveux à cette idée d’ailleurs mais ce n’était pas si évident pour toi d’en parler parce qu’une partie de toi avait du mal à l’assumer. Prenant la dernière bouchée de ton plat, tu posais la fourchette sur la table avant de t’essuyer la bouche. Tu espérais que tu allais bien formuler les choses pour qu’il n’y ait pas de malentendu. « Des fois je ne peux m’empêcher d’imaginer un enfant courir dans notre maison, un enfant qui aurait tes yeux et sur lequel je lirais tous les jours tes traits. » C’est à demi voix que tu prononçais ces mots, comme un secret non avoué. Il y avait tellement de raisons qui faisaient que cette idée n’était certainement pas très bonnes, tu les avais toutes listées dans ta tête mais cela n’empêchait pas que tu y pensais régulièrement, comme cela ne t’empêchait pas de mettre de l’argent de côté si un jour vous décidiez de vous lancer dans cette aventure. Comme cet argent n’irait certainement jamais dans ce projet, il irait aux enfants et c’était l’essentiel non ? « C’est égoïste et ridicule, je le sais. C’est juste que je ne peux pas m’empêcher d’y penser. » Dis-tu en haussant les épaules. Personne n’est parfait et toi, tu es bien loin de l’être.

Timide, tu ne l’avais jamais été. Tu faisais parti des gens qui ont toujours quelque chose à dire, toujours un mot pour relancer la conversation. On entend toujours le son de ta voix dans les conversations et pourtant, tu es certain que si tu demandais aux personnes t’ayant côtoyées pendant une soirée, elles ne sauraient au final pas grand chose sur toi. C’était un talent, parler sans jamais trop en dévoiler de soi-même. Malgré le fait que tu avais moins de mal à te livrer que Jensen pouvait en avoir, ce n’était pas simple pour toi d’aborder tous les sujets et en particulier celui d’avoir un nouvel enfant avec Jensen. En réalité, ce n’était pas l’idée d’avoir un nouvel enfant qui te faisait peur, c’était plutôt la manière dont tu voulais que cela arriver cette fois. Est-ce que c’était ton âge qui faisait que tu commençais à sentir que si tu n’en parlais pas bientôt tu n’en parlerais jamais ? Tu ne saurais dire mais alors que Jensen te pressait de lui dire ce que tu avais en tête, tu ne pus t’empêcher de lui répondre sans détour. Certes, tu avais un peu de mal à assumer ce que tu lui avais avoué à demi-mots parce que tu étais fier de ce que vous aviez accomplis jusqu’ici. Vous aviez sortis quatre enfants extraordinaires de situations difficiles, vous leur offriez un futur qu’ils méritaient. Il devait rester des centaines voire des milliers d’enfants dans cette situation dans le pays mais toi, ce que tu désirais c’était un bébé, un enfant avec les traits de Jensen. Alors oui, tu savais que c’était égoïste mais tu ne pouvais pas garder cette idée pour toi bien plus longtemps. Incapable de croiser le regard de Jensen en prononçant ces paroles, tu replongeais ton regard dans celui de ton compagnon quand il te prit la main et te dit : « Ca ne l’est pas John. Pas du tout même, bien au contraire. C’est quelque chose que j’ai à l’esprit depuis longtemps aussi. Avoir un autre enfant, agrandir la famille. Seulement je ne savais pas si c’était quelque chose dont tu aurais envie. » Un petit sourire se dessina sur ton visage. Entendre Jensen te dire que lui aussi pensait à avoir un autre enfant était un soulagement. Parce que c’était l’affirmation que vous alliez dans la même direction, vous vous n’envisagiez pas les choses différemment. Toutefois il y avait une différence entre avoir un enfant et avoir un enfant avec votre ADN. « Moi aussi j’aimerais voir un petit gars avec ton sourire et ton assurance partager nos vies. Ca me plairait énormément même. Mais je ne veux pas qu’on se lance dans cette aventure sans être sûr de nous. Je ne voudrais pas qu’on soit déçu. » La déception … Drôle de sentiment. On l’appréhende toujours, on essaie de l’éviter mais finalement, est-ce qu’elle n’est pas un frein la plupart du temps ? Jensen sait qu’à chaque prise de risque, il y a une chance que cela ne fonctionne pas. Et pour tout un tas de raisons, il était possible que les tentatives que vous feriez n’allaient pas fonctionner. Mais est-ce que c’était une raison suffisante pour ne rien tenter ? Pas à tes yeux. « Il est évident que ce n’est pas une décision que nous devons prendre à la légère. Personne ne pourra nous garantir que nous ne serons pas déçus, il faudra se lancer avec cette possibilité si on décide de prendre cette voie. » Dis-tu dans un premier temps. Mais tu voulais soulever un autre point à ton compagnon, un point qui n’était à tes yeux pas négligeable : « Je sais que je suis le premier à en plaisanter mais si on se lance dans cette aventure, je veux que tu aies conscience de ce qu’avoir potentiellement un bébé à mon âge signifie. Je ne suis plus dans la fleur de l’âge et cela aura un impact sur cet enfant. » Pas que tu comptais mourir de manière précoce, pas que cela soit rare que des hommes murs aient des enfants, tu voulais simplement faire remarquer à Jensen que ce facteur n’était pas neutre dans votre décision. « C’est une décision que l’on devra également discuter avec les enfants. Si on décide de se lancer, l’impact financier les concernera aussi. J’ai déjà l’argent pour tout couvrir mais c’est de l’argent que ne récupèreront pas les enfants. » Dis-tu avant d’ajouter : « On risque de devoir se battre pour savoir qui donnera son ADN si l’on veut tous les deux une part de l’autre dans cet enfant. » Dis-tu un sourire amusé sur les lèvres pour que le sujet redevienne un peu plus léger.

S’assumer comme un homme homosexuel ce n’était jamais simple et cela était encore plus compliqué quand tu étais adolescent et jeune adulte. Maintenant, les gens acceptaient à peu près que deux hommes fassent leur vie ensemble toutefois, dès que les enfants entraient dans la discussion alors le conservatisme revenait de plus belle. Cela t’amusait de voir que vous étiez le pays le plus avancé sur ces sujets et en même temps celui qui avait le plus de mal à accepter des choses aussi simple qu’une mère porteuse portant un enfant pour deux hommes. Dans cette démarche qui trottait dans ta tête depuis longtemps, tu savais qu’il y avait des dizaines de possibilités que cela tourne mal. Tu avais assez étudié la question pour savoir à quels moments cela pouvait capoter. Toutefois, tu n’arrivais pas à te sortir cette idée de la tête et il était peut-être temps de faire un essai. Si cela ne fonctionnait pas, vous auriez au moins essayé. Voir que Jensen avait aussi pensé à cette possibilité et savoir que cela l’intéressait te rassurait. « Vraiment ? » Cela ne te surprenait pas que Jensen ne se soit pas douté que tu mettais régulièrement de l’argent de côté. Il y avait la maison que vous remboursiez tous les deux et les frais pour les enfants et pour vous mais tu avais toujours réussi à mettre de l’argent de côté, particulièrement quand tu étais seul et quand Jensen et toi n’étiez que tous les deux. « On pourrait le faire tous les deux ? Voir comment l’insémination prend et puis j’ai déjà entendu dire que certaines femmes qui ont deux hommes dans leurs vies se retrouvent enceinte de jumeaux avec des pères différents. Ca pourrait être le cas ici. » Tu ne pus t’empêcher de laisser échapper un petit rire avant de lui répondre : « Tu penses que nous sommes prêts pour des jumeaux ? » Tu le taquinais bien entendu. Tu n’avais même pas pensé à cette possibilité mais à vraie dire, tu prendrais n’importe quelle possibilité du moment que tu pouvais avoir cet enfant. « Je suppose que nous suivrons les conseils du personnel médical pour optimiser nos chances. Au fond je ne suis pas difficile. » Dis-tu en haussant les épaules. Tu n’allais pas faire la fine bouche non plus, l’essentiel était vraiment pour toi d’ajouter une nouvelle pierre à votre famille et pour cela, tu comptais bien avoir les enfants de votre côté. « Tu as raison pour les enfants. Je ne sais pas s’ils pensent vraiment à l’argent, mais il faut au moins leur dire ce qu’on projette de faire, surtout si ça fonctionne. Tu y penses donc depuis vraiment très longtemps ? » En dehors des questions financières, les enfants seraient forcément impactés si un bébé arrivait dans vos vies. Mais tu ne te faisais pas trop de soucis à ce sujet. Vous aviez établi avec vos enfants des lignes de communication qui vous permettaient d’aborder tous les sujets. Ta main toujours glissée dans celle de ton compagnon, tu lui répondis : « Quand tu sais que tu ne coucheras jamais avec une femme dès l’adolescence, tu sais qu’avoir des enfants va devenir un challenge. Alors je me suis renseigné et j’ai compris que ce qu’il me faudrait dans tous les cas était de l’argent. Je n’avais pas une méthode préférée en vérité mais depuis qu’on a les enfants, j’y pense. » Dis-tu en haussant les épaules. « J’ai toujours voulu avoir une famille et j’ai toujours su que ce serait plus compliqué pour moi que mon frère. » Ajoutas-tu alors que le serveur venait vous débarrasser de vos assiettes. Alors que ce dernier revenait avec les cartes pour les desserts, tu ne pus t’empêcher de proposer à Jensen : « Et si on prenait le dessert à la maison ? » Malgré vos discussions, tu n’avais nullement oublié que cette dernière était vide et n’attendait que vous.