Il sursaute au moment où quelqu’un cogne à sa porte. Il lève la tête, les sourcils froncés. Un de ses collègues qui vient lui prendre la tête avec ce qui s’est passé? Peu probable, qu’il se dit, parce qu’ils le connaissent assez pour savoir que même s’il est quelqu’un de raisonnable et poli normalement, aujourd’hui, il leur claquerait probablement la porte au visage. Il est quand même capable de décider tout seul de ce qui est mieux pour lui, non?
Il pousse un petit grognement plaintif en se relevant du sofa et prend une grande inspiration avant de poser la main sur la poignée. Il s’efforce d’avoir l’air bien quand il ouvre la porte. Lorsqu’il réalise qui se trouve derrière, il fige quelques instants. « M-… Qu’est-ce que… » Evans? Alors elle ne l’appellera même plus par son prénom, maintenant? La bouche entre-ouverte, il ne sait pas quoi dire. Il ne sait pas quoi faire. En fait, il n’arrive pas vraiment à croire qu’elle soit là. Pourtant, il s’est imaginé la scène tellement de fois. Il devrait avoir préparé un discours, peut-être se mettre à genou pour lui demander pardon… Il esquisse un léger sourire, imperceptible, à cette pensée sans doute ridicule, mais aussi parce qu’il est malgré tout heureux de réaliser qu’elle s’inquiétait probablement pour lui.
Elle est devant chez lui, debout dans son entrée. Il sait qu’au fond, ça ne fait pas si longtemps qu’il l’a vu, mais il ne peut s’empêcher de se dire qu’elle est toujours aussi belle, Max. Il se dit aussi que lui, il ne doit pas être à son meilleur, le corps qui commence déjà à devenir bleu aux endroits d’impacts sous ses vêtements. Il sait qu’elle ne voit pas à travers, évidemment, mais il est conscient qu’elle n’est pas aveugle non plus. Elle est un flic, elle sait quoi et où regarder, c’est son boulot. Sa façon de marcher, de parler peut-être aussi, sans mentionner les hématomes qui paraissent peut-être sur ses bras et un plâtre fraichement fait sur son poignet gauche, qu’il cache plutôt habilement derrière la porte jusqu’à maintenant, tous des signes de ce qui s’est passé. Des signes d’à quel point il s’est planté, aujourd’hui.
Elle pointe du doigt sa voiture, elle est déjà prête à repartir. Jake, lui, n’y est pas prêt. « Non! » Une main en l’air comme s’il voulait la retenir, il se mord la lèvre, gêné d’avoir réagi si précipitamment. « Non, euhm… » reprend-t-il, plus doucement et, il l’espère, plus naturellement. « Je t’en prie, ne t’en vas pas tout de suite. » Il a peur qu’elle ne soit pas convaincue, il a l’impression qu’elle va s’en aller malgré tout, alors il pousse un petit soupire. Il abandonne l’air confiant qu’il aurait normalement voulu prendre devant elle. « Ça ne va pas. » Son orgueil lui fait mal, parce que non seulement il sait qu’il va peut-être devoir la supplier, mais tout cela est plutôt gênant : il est dans cet état là parce qu’il n’a pas été assez prudent. « Est-ce que tu peux rentrer? Quelques minutes seulement. » Il hausse les épaules. « Je ne t’embêterai pas, promis. » Autrement dit, il veut simplement qu’elle reste un peu plus longtemps avec lui, même si cela veut dire qu’il ne peut pas en profiter pour tenter de se faire pardonner. Elle ne veut probablement toujours pas l’entendre, de toute façon. Il se dégage un peu de l’entrée pour lui faire signe de le rejoindre. « J’ai du thé ou du chocolat chaud si tu veux… De la bière aussi. » Il ne sait pas trop, ou en tout cas pas encore, dans quel humeur elle est actuellement.