we're not promised tomorrow / krisliam

so i'm gonna love you like i'm gonna lose you
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@kristen walcott

La porte du taxi se referme brutalement, quelques billets sont rapidement abandonnés dans la main tendue du chauffeur. Il n’a pas le temps de lui dire de garder la monnaie, ni même de s’assurer qu’il n’a rien oublié sur la banquette arrière – William, il est déjà en train de se frayer un chemin entre les ambulances stationnées, les brancards qui sont pris en charge et les visiteurs inquiets. Il aurait probablement du prendre l’entrée principale – mais ça voudrait dire affronter la foule des urgences, probablement être arrêté par une infirmière bien intentionnée et il n’est pas d’humeur à patienter, moins encore à ce qu’on lui dise de repasser plus tard. Il a eu l’information vers la fin de la manifestation qui l’a bloqué au bureau, de la bouche de Tina (pas si inutile, finalement). Il a lui arraché les mots de la bouche parce qu’elle était proche de la panique, lui rappelant à moitié qu’il avait un procès pour lequel il était déjà plus qu’en retard, mais quand elle a parlé de l’hôpital, quand elle a mentionné ce qu’il s’y était déroulé, une vague de terreur et d’adrénaline s’est infiltré dans ses veines. Il a rapidement survolé les informations qui ont filtré durant le trajet – quelques articles postés sur le net mentionnant les différents événements qui ont secoué Miami en l’espace d’une seule journée. Un pavé lancé à travers une fenêtre en plein milieu d’un gala, un vent de panique parmi le personnel de l’hôpital et les patients. Son cœur s’est serré en pensant à Kristen, à Jack, avant qu’il n’essaie de les appeler mais n’a pu que tomber sur leur répondeur, sans surprise. Il repère finalement la chevelure de la chirurgienne, laisse un ambulancier qui pousse un brancard passer. « Kris ! » qu’il appelle, le cœur un peu moins affolé maintenant qu’il l’a trouvée et qu’il sait qu’elle est debout et non pas allongée dans un des lits de l’hôpital. Il parvient à sa hauteur, un soupir de soulagement s’échappant de ses lèvres. Il voudrait la prendre dans ses bras mais il se retient, la scrute plutôt et note les coupures parsemées sur son visage et ses bras. Mâchoire serrée, il se promet de retrouver la personne à l’origine de cette attaque contre l’hôpital – il se promet de mener le procès jusqu’à ce que cette pourriture regrette que la peine de mort ne soit pas pour les petites teignes de son genre mais pour les grands meurtriers. « J’ai su ce qui est arrivé, tu vas bien ? » Il a une main levée entre eux, dirigée vers l’épaule de l’obstétricienne sans qu’il ne la touche complètement – parce qu’il en a perdu ce droit. Ils ne se sont plus revus depuis leur conversation sur la plage. Leur amitié, bien que prétendue conservée, est affectée par ce qui a été dit, il en a conscience et ça lui loge une sensation désagréable dans la poitrine à chaque fois qu’il y repense, alors il a préféré ne plus y penser pour se concentrer sur son travail et les procès à venir. Il n’a pas réfléchi, en se dirigeant vers l’hôpital pour s’assurer qu’elle aille bien, qu’elle n’ait pas été touchée plus gravement ou pire (il a refusé à penser au pire, refoulant les images qui l’ont assailli en ordonnant à Tina de prévenir le juge d’une urgence) ; mais maintenant qu’il se trouve devant elle, sans savoir comment agir, sans savoir comment il a le droit d’agir, il se rend compte qu’il aurait peut-être dû réfléchir avant de débarquer sous une impulsion, sous le besoin de la voir.

Kristen est encore secouée par ce qu’il vient de se produire, elle a eu terriblement peur, pour Ali qui a reçu un méchant coup à la tête et encore plus pour sa fille Sofia qui se trouvait parmi eux au moment des faits. Un simple pavé avait fait fuir toute une foule de personnels de l’hôpital venue célébrer un moment historique. Ça aurait pu s’apparenter à un coup de feu et à Miami plus que dans n’importe quelle autre ville de Floride, on se méfie de ce genre de choses. La ville a connu et connait de nombreuses fusillades perpétuées par un groupe de sympathisant qui ne semble pas voir le danger dans le fait de porter une arme à feu. Elle a de nombreuses coupures au visage et sur les bras, les seules parties de son corps qui étaient découvertes, heureusement pour elle, le reste de son corps a été épargné grâce à sa longue robe rose satinée. Après s’être assurée que Sofia allait bien, Kristen était restée au chevet d’Ali qui semblait se remettre doucement de sa blessure à la tête causée par le pavé en question. Elle l’avait vu s’effondrer sous ses yeux et avait ressenti une nouvelle fois la crainte de perdre un être aimé. Ils rigolaient tous les trois, comme une famille mais on appela Kristen à l’accueil des ambulances pour signer la décharge de sortie de Sofia. Alors qu’elle remplissait les papiers, elle entendit son nom, une voix qu’elle reconnaitrait parmi tant d’autres : William. Il se fraye un chemin pour venir jusqu’à elle. Elle le regarde, interloquée par son apparition, elle se demandait ce qu’il faisait ici. Il semblait légèrement essoufflé, comme ci, la rejoindre avait été un périple sans précédent. Elle comprend grâce à sa question qu’il vient prendre de ses nouvelles. Elle est flattée qu’il prenne le temps de passer la voir. — Oui ça va, je te remercie. Plus de peur que de mal. dit-elle en le regardant ayant du mal à lever ses lèvres pour esquisser un sourire suite aux coupures qui ont entaillé superficiellement son visage. Même si elle lui avait promis sur la plage que cette relation amicale lui convenait tout à fait, ça n’était pas forcément le cas. Elle comptait bien le voir un peu moins pour tenter d’oublier le fait qu’elle s’était attachée à lui un peu plus qu’amicalement. La chirurgienne espérait prendre un peu de recul sur cette histoire mais force était de constater qu’ils étaient amenés à se revoir plus rapidement qu’elle ne l’aurait cru. Alors que le substitut du procureur restait planté devant elle, elle se demandait ce qui l’avait amené ici. Est-ce qu’il avait vraiment fait tout le chemin depuis le bureau du procureur pour savoir comment elle allait ? Cette idée se dissipa dans l’esprit de Kristen, Will avait été clair sur le fait qu’ils étaient amis, rien de plus. — Est-ce que je peux t’aider ? Tu es venu voir quelqu’un ? lui demanda-t-elle, persuadée qu’il était venu jusqu’à l’hôpital pour autre chose que pour voir si elle allait bien.

Sa gorge semble s’être resserrée, sa poitrine être compressée ; Kristen se veut rassurante, essaie un sourire sans doute pour appuyer ses propos, il a du mal à la croire. Il ne parvient pas à imaginer le traumatisme que ça a dût être pour elle, pour tous ceux présents à l’hôpital mais tout les autres lui paraissent bien secondaires. Il opine gravement de la tête, pourtant pas entièrement convaincu. Il voit les entailles qui ont l’air peu profondes mais qui marquent tout de même son corps et il a de nouveau une vague de haine pure et blanche à l’encontre du ou des responsables. Il la scrute, incapable de détourner le regard, refoulant cette envie d’avoir un geste tendre – un geste faible – à son encontre et quand elle l’interroge, il est confus pendant une seconde. « Je… Non, je… » Je suis venu te voir, qu’il voudrait admettre pour relâcher la pression qui lui pèse sur les épaules, pour aider son diaphragme à se soulever correctement mais les mots restent bloqués. Alors il les ravale, tourne finalement la tête en passant une main dans ses cheveux, l’autre plongée dans sa poche de pantalon. C’est mieux, qu’il essaie de se convaincre – les choses pourraient devenir encore plus compliquées qu’elles ne le sont déjà et il aime la simplicité, William. « Personne n’a été gravement blessé ? » Hormis Jack, il n’a pas vraiment de contact avec le personnel de l’hôpital, n’a pas particulièrement l’intention d’y pénétrer et d’être confronté à une nouvelle foule et l’odeur de javel et d’antiseptique propre au bâtiment. « On sait qui a fait ça ? Les flics ont arrêté quelqu’un ? » La conscience professionnelle prend le dessus parce que c’est plus simple, pour lui. Ça lui évite d’avoir à gérer des émotions qu’il continue d’enfouir, mais il lui suffit de poser son regard caramel sur la chirurgienne pour qu’elles reviennent, en vrac et incompréhensibles. Un oiseau se dépose sur le sommet d’une ambulance proche, William l’observe un instant, le vent soufflant légèrement, lui murmure à l’oreille les mots échangés sur la plage. Tu te trompes, Will, si tu voulais, tu pourrais tout à fait être cet homme. Il entend la voix de Kristen, claire et limpide, comme si elle prononce les mots en cet instant, dans ce cadre étrange et pas approprié pour une discussion à cœur ouvert. Il y repense, souvent – bien plus qu’il ne veut se l’admettre, bien plus qu’il n’est prêt à l’admettre. Kristen, elle est extraordinaire, il le sait. Il a appris à le découvrir à mesure qu’ils ont passé du temps ensemble sur leurs planches ou autour d’un verre, plus récemment. Et peut-être qu’elle a raison, dans le fond. Peut-être qu’il le pourrait mais il en doute – il se connaît, il sait qu’il finira, inévitablement, par foutre la relation en l’air d’une façon ou d’une autre. Ça ferait voler en éclat leur amitié devenue si précieuse, trop précieuse peut-être, et il n’y est pas prêt. « Quelqu’un t’a déjà examinée ? » Un signe de la tête pour désigner les balafres qui ornent ses bras, l’inquiétude à présent oubliée mais quelques miettes persistantes sont laissées derrière.

Tout s’est passé si rapidement, Kristen ne réalise pas encore l’ampleur de cet incident. Et alors qu’elle attend une réponse de Will pour pouvoir lui indiquer où se diriger en fonction de ce qui lui répondrait, ce dernier balbutie vaguement quelque chose. C’était comme s’il ne voulait pas lui donner la véritable raison de sa venue. La chirurgienne le regarde, elle fronce légèrement les sourcils, elle n’est pas sûre de comprendre ce qu’il se passe mais alors qu’elle s’apprête à dire quelque chose, son ami lui demande si personne n’a été gravement blessé. Elle soupire, en repensant à Ali étendu sur le sol, revoir cette image lui fait remonter certaines de ses peurs de voir sa famille une nouvelle fois brisée par la tragédie. — Ali  a reçu le pavé sur l’arrière du crâne, heureusement, le fait qu’il ait été balancé contre la vitre avant à atténuer sa chute et il n’a qu’une légère commotion. dit-elle en regardant la salle des urgences dans laquelle se trouve actuellement son ex-mari et sa fille. Ils ont beau ne plus être ensemble, elle s’inquiétera toujours pour lui car d’une certaine façon, elle l’aimera toujours. Néanmoins, ça lui fait une sensation étrange de parler d’Ali devant William. Elle avait cru l’espace de quelques jours qu’il aurait pu être celui qui lui ferait oublié son ex-mari, qui n’était jamais véritablement sorti de sa tête, mais elle avait abandonné cette idée après cette fameuse soirée au bar. Il l’avait dit lui-même lors de leur précédente conversation, il n’est pas ce genre d’homme même si elle restait persuadée que s’il s’en donnait les moyens, il pourrait l’être. En tout cas, c’est ce qu’elle avait perçu au gré de leurs nombreuses retrouvailles ces derniers temps. Le substitut du procureur reprend du service et lui demande s’ils savent qui a fait ça. — J’ai vu passer quelques policiers tout à l’heure, je crois qu’ils visionnent les caméras de surveillance. lui répondit-elle en se souvenant avoir entendu une conversation entre la chef des infirmières des urgences et les hommes en uniforme lorsqu’elle avait été cherché un jus de fruit à Sofia. — Qui que ce soit on va sûrement vite le retrouver, l’entrée de l’hôpital est truffée de caméra. fait-elle remarquer. Il est vrai que ça allait être difficile pour le coupable de passer inaperçu et c’était tant mieux, elle voulait qu’il assume ses actes car s’il n’avait fait aucun blessé grave, le résultat aurait pu être tout autre. Elle s’arrête un instant, elle regarde ses mains, les questions de William lui font se remémorer la scène. — Tu sais, j’ai vraiment cru … que c’était un coup de feu. dit-elle à William comme si elle revivait l’évènement. Avec Ali et Sofia elle n’avait pas encore eu le temps de se rendre compte, de réaliser ce qu’il s’était produit sous ses yeux mais c’était la première chose à laquelle elle avait pensé et elle n’avait pas été la seule. Elle ne peut s’empêcher de d’avoir les yeux embués en disant cela à William, elle a eu tellement peur pour sa famille qu’elle cache difficilement son émotion. Le substitut lui demande si on l’a déjà examiné et elle ne peut s’empêcher de sourire, même si c’est difficile pour elle avec les coupures qui déparent son visage. — Ce ne sont que des petites coupures superficielles, rien de grave. dit-elle en regardant ses bras avant de rencontrer à nouveau le regard de William. Elle peine à maintenir cet échange, elle se sent encore stupide d’avoir cru qu’ils auraient pu être plus que des amis. — Oh mais tu dois sûrement être là pour aider la police à retrouver le coupable. dit-elle comme pour trouver une justification à sa venue. Elle ne voulait pas croire qu’il était venu pour savoir comment elle allait, elle ne voulait pas une nouvelle fois se faire des idées. — Est-ce que tu veux que je t’accompagne jusqu’au bureau de notre directrice ? demande-t-elle en désignant l’ascenseur d’un mouvement de tête.

Sa poitrine se compresse à l’instant où le nom d’Alexander est prononcé. Il ravale la bile amère qui lui est venue en se rappelant que les anciens époux travaillent quotidiennement ensemble et que, bien sûr, il avait été au gala, lui aussi. Il l’aime bien, pourtant, Ali – du peu de fois où leurs chemins se sont croisés, en tout cas. A même un certain respect pour l’homme qui l’a bien aidé lors d’un procès en acceptant de témoigner en tant qu’expert et en notant des détails que d’autres n’avaient pas remarqué, mais il est souvent venu à oublier qui il est, pour Kristen et le rappel est maintenant brutal. Désagréable, aussi. Il s’empêche de suivre le regard de l’obstétricienne, conscient de ce qu’il verrait au bout du couloir et que son estomac se retournerait, contrit, une nouvelle fois. Un sentiment auquel il n’avait encore jamais été confronté – ou plus depuis l’adolescence, plus depuis qu’il avait compris que sa sœur resterait la préférée de leur père, peu importe ce qu’il accomplissait. Le retour de cette pointe de jalousie est difficile à avaler, plus encore à accepter et il préfère se persuader que ça n’a à voir avec la relation que les deux Walcott ont pu entretenir mais tout à voir avec le fait qu’il se sente démuni face à ce qu’il s’est passé et qui les mène dans cette situation. Il déglutit difficilement l’amertume, opine à peine aux propos qui sont échangés et détourne déjà la conversation – parce que si Ali est hors de danger alors c’est tant mieux mais il se trouve incapable de le formuler et il n’insiste pas. Il acquiesce avec plus de vigueur, se rappelle avoir aperçu plusieurs véhicules des forces de l’ordre en stationnement en arrivant. « Ils ont pu intervenir rapidement ? » Il sait qu’ils sont débordés, raison pour laquelle ils ont mis du temps avant d’arriver au cabinet, espère que ça n’a pas été le cas en ce concerne leur intervention à l’hôpital. Il a détourné les yeux, se demande ce que faisaient les agents de sécurité de l’hôpital, pourquoi ils n’ont pas empêché le malfrat d’agir, pourquoi ils n’ont pas été plus nombreux mais la voix de Kristen reprend, hésitante et il reporte son attention sur elle. Il a le cœur qui se serre à sa voix nouée, note les tremblements de sa main, les larmes dans ses yeux. Sans prendre le temps de réfléchir, il l’attrape doucement par l’épaule, l’oblige à relever le regard de deux doigts sous le menton. « Hey, tout va bien. T’es en sécurité maintenant et tu l’as dit toi-même : ils vont le retrouver. Et je m’assurerai qu’il ne s’en tire pas à si bon compte, tu peux me faire confiance. » Son pouce vient caresser sa joue dans un geste rassurant, réconfortant, comme pour appuyer ses mots avant qu’il ne laisse retomber ses bras. Ne s’inquiète pour ses blessures, beaucoup plus concrètes que cette vague d’émotion qui lui retourne le cerveau – et le cœur. Il n’a pas le temps d’argumenter sur la superficialité des coupures qu’elle reprend, ramène le sujet de l’enquête qui a lieu sur le tapis et il ne nie pas. Toujours pas. Il devrait lui avouer qu’il est là pour elle, uniquement elle, même s’il joue son rôle à la perfection à force d’habitude, mais il n’est pas certain que ce soit une bonne idée. « Ça peut attendre que tu te sois faite examinée. » Il la scrute, l’incite à avancer en portant une main dans son dos. Il ne la touche pas, ou si peu, parce qu’il se l’interdit. Il se laisse être à moitié guidée par elle parce que l’hôpital, c’est le territoire de Kristen, pas le sien. Les infirmières sont toutes occupées avec les autres blessés et en croisant le regard de la chirurgienne obstétrique, il comprend qu’elle en avait probablement conscience. « Quand on redescend, tu te fais examiner. » Ce n’est pas une négociation, pas entièrement un ordre non plus – quelque chose à mi-chemin entre une promesse et un espoir, peut-être. De quel ordre exactement, il n’en sait rien. Quelques enjambées leur suffisent pour se glisser dans un ascenseur avant que les portes ne se referment. Un trio de médecins s’y trouvent déjà, les abandonne pourtant l’étage suivant. Il se passe une main dans les cheveux, le regard toujours posé sur celle qui l’accompagne. « Kris ? » Il ne sait pas pourquoi il l’appelle, pourquoi il souhaite attirer son attention. Il ne sait pas s’il veut l’enlacer pour la rassurer pour de vrai, pour se rassurer pour de vrai, ou s’il veut l’embrasser et lui faire comprendre qu’il en a rien à foutre de l’enquête ou de la directrice du Mercy. « Je suis content que – que tu n’aies rien. » Et peut-être que dans ses yeux brillent les émotions qu’il tait parce qu’il n’est pas sûr de les comprendre, peut-être que sa voix s’est étranglée à mi-chemin à cause d’elles – il ne bouge pourtant pas, toujours appuyé contre l’une des parois de l’ascenseur, une main dans une poche, l’autre sur la rambarde.

À mesure que la conversation avance, Kristen sent que Will ne veut pas la laisser et si leur dialogue prend une tournure beaucoup plus professionnelle, la chirurgienne ne peut s’empêcher d’avoir cette once d’espoir qu’il soit venu jusqu’à elle parce qu’il s’inquiétait. Elle sait que ça ne serait que de façon amicale mais malgré tout elle n’arrive pas à penser qu’il n’est là qu’en tant qu’ami. Les questions se chamboulent dans la tête de l’ancienne photographe et elle préfère y mettre un terme, elle a d’autres choses à régler que sa relation avec Will à cet instant. Il lui demande si la police a pu intervenir rapidement, à vrai dire, elle est incapable de lui répondre. Tout s’est enchaîné très vite et elle est restée avec Ali tout ce temps jusqu’à ce qu’elle croise le substitut du procureur. — Je ne sais pas … tout ce que je sais c’est que les manifestants ont décampé à la minute où le pavé a été jeté. lui indique-t-elle en rejouant cette scène difficilement supportable dans sa tête. Elle se souvient avoir tourné la tête en direction de la vitre et avoir vu la petite foule de manifestants courir à l’opposé de l’hôpital après elle s’est uniquement concentrée sur Ali et sur sa fille avec l’aide d’Amelia. Alors qu’elle lui explique qu’elle a eu terriblement peur, Will appose son pouce contre sa joue, voilà longtemps qu’ils n’ont pas été aussi proche, un frisson la parcourt, il lui fait quelque chose et même si elle aurait aimé ne rien ressentir face à sa posture rassurante, elle laisse tomber sa joue contre son pouce. Ça lui fait tellement de bien d’avoir quelqu’un qui lui dit que ça va aller. Elle plonge son regard dans celui de William en guise de merci d’être là pour moi même si aucun son ne sort de sa bouche. Les yeux brillants, elle n’a pas besoin de parler à cet instant pour que son ami comprenne ce qu’elle veut lui dire. Kris revient à la réalité lorsqu’elle repense à cette conversation sur la plage, il a été clair, ce ne sont que des amis et rien de plus. Elle relève légèrement sa tête et reprend sur l’objectif de sa venue. Il lui dit qu’ils peuvent se rendre dans le bureau de la directrice de l’hôpital et même s’il met un point d’honneur à lui faire remarquer qu’elle devra se faire examiner, il la guide jusqu’à l’ascenseur d’une main timide, qui effleure le bas de son dos. Il reprend sur le fait qu’elle devra se faire examiner à leur retour, elle ne peut s’empêcher de sourire même si c’est toujours aussi compliqué pour elle, à cause de ses blessures superficielles. — Will je suis médecin, si je te dis que ça va, c’est que ça va. répondit-elle en appelant l’ascenseur à l’aide du bouton rond qui orne le mur. Lorsqu’elle entre, quelques médecins se trouvent déjà dans l’ascenseur, elle prend soin d’appuyer sur le bouton du dernier étage, direction le bureau de la directrice. À l’étage suivant, ils ne sont plus que tous les deux dans cet espace clos qui est censé les amener en haut de la tour de l’hôpital. Elle reste focalisée le nez en l’air, sur les étages qui défilent petit à petit, c’est trop lent à son goût. Elle ne supporte pas de rester si près de Will en sachant ce qu’il s’est passé entre eux, en sachant qu’ils ne sont qu’amis, rien de plus. Et puis il l’appelle, comme s’ils se trouvaient à quelques centaines de mètres, Kris se retourne, il est adossé contre la rambarde et il lui dit qu’il est content qu’elle n’ait rien. Elle lui fait un signe de tête, elle ose à peine le regarder, elle ne comprend toujours pas à quoi il joue, est-ce qu’un ami lui dirait une telle chose ? Jack oui mais avec Will ils n’ont jamais eu cette proximité amicale, avec Will c’était plus que ça et même s’il s’évertue à dire que ce n’est pas le cas, elle reste persuadée qu’il y a eu plus entre eux. Elle s’est déjà casser les dents à lui dire ce qu’elle pensait, elle ne veut pas recommencer une seconde fois. Will c’est du passé, s’était-elle dit à elle-même en revenant de la plage. — On devrait bientôt arriver. dit-elle en lui faisant signe vers les numéros des étages qui défilent sur l’ascenseur. — Quand tu arriveras ce sera le bureau au fond à droite de l’ascenseur. explique-t-elle, lui faisant ainsi comprendre qu’elle ne l’accompagnera pas jusqu’à la porte du bureau d’Hera.

Il baisse les yeux, la mâchoire contractée. Il se retient de serrer les poings parce qu’il a conscience que s’énerver, là, dans l’instant, serait futile. La colère qu’il éprouve s’estompe toutefois à l’aveu de Kristen – des mots presque soufflés du bout des lèvres, à peine audibles, mais qui viennent pourtant le frapper avec force. Le visage de la chirurgienne est des plus expressifs et il n’a pas besoin d’être fin connaisseur pour lire la peur qui s’est emparée d’elle sur le moment, la peur qui reste encore présente en cet instant. Il agit par réflexe, presque automatisme, en levant une main à son visage, approché d’un pas. Sous son pouce, il sent les entailles qui criblent son visage. Il déglutit, profite du toucher qui le renvoie à des semaines plus tôt, aux instants passés dans les bras l’un de l’autre, aux sourires et aux baisers échangés. Il la sent se laisser aller contre sa paume, l’impression de ne pas être suffisant qui lui étreint le cœur et l’être entier, jusqu’à ce que leurs regards se croisent. Il comprend les mots qu’elle tait, lui promet un always qui ne quitte pas davantage ses lèvres. L’instant est brisé, Kristen retrouvant une droiture dans sa posture et William laisse sa main retomber platement le long de son corps. Il est trop tard pour cette intimité – un désire qu’il n’avait même pas conscience d’avoir jusqu’à cette précieuse minute. Il se convainc que c’est l’adrénaline qui parle et agit pour lui, que c’est une inquiète platonique et normale d’avoir pour tous ses proches en repoussant l’idée qu’il n’ait pas pensé à aller voir Jack une seule depuis qu’il est arrivé à l’hôpital. C’est différent, qu’il se répète tout en sachant que ça ne l’est pas totalement, qu’il se berce d’illusions parce que c’est ce qui lui convient le mieux. « J’ai entendu dire que les médecins étaient les pires patients, » glisse-t-il sur un ton qui se voudrait léger, un sourire au coin des lèvres tandis qu’ils patientent devant l’ascenseur. Il n’insistera pas davantage, toutefois, parce qu’il ne tient pas à s’attirer les foudres de Kristen. Ils s’engouffrent dans l’engin, lui, le dos collé contre l’une des parois, le regard dérivé vers les portes jusqu’à ce qu’ils se retrouvent finalement seuls. Il en dit trop et en même pas assez, il le voit à la façon qu’elle a de fuir son regard. Alors il détourne le sien. Peut-être qu’il a raté sa chance, peut-être qu’il a été trop long, trop con aussi, et qu’il aurait mieux fait de se taire. Il encaisse la réponse, lève les yeux par un réflexe vers les étages qui continuent de défiler. Les portes s’ouvrent avec la sonnerie propre aux ascenseurs et il avance jusqu’à quitter l’habitacle, se retourne pour la scruter une nouvelle fois. Peut-être qu’il devrait parler, lui dire de prendre soin d’elle, la remercier de l’avoir accompagné jusque-là. Peut-être qu’il devrait lui dire qu’il passera la voir avant de partir, lui proposer de partager une bière ou une bouteille de vin ; peut-être qu’il devrait lui dire de passer le bonjour à Ali pour lui mais les mots ne lui viennent pas et les portes se referment, de toute façon, trop rapidement. Quand il fait face à son reflet, il tourne les talons et se dirige vers le bureau d’Hera Charming, un masque professionnel déjà revêtu, à force d’habitude.

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sujet terminé